Neurologie : du bricolage à la syntaxe, il n’y a qu’un pas…

24 novembre 2021

Avez-vous remarqué que les plus bricoleurs d’entre nous ont plus de capacité à maîtriser la syntaxe de la langue française ? Pas forcément ? Pourtant, ces deux compétences seraient liées à la stimulation de la même aire cérébrale. Explications.

Au fil des siècles, les spécialistes de la paléo-neurobiologie* ont remarqué que les cerveaux, en particulier les aires dédiées au langage, n’ont cessé de se développer en fonction de l’accès aux technologies.

Des scientifiques français* en partenariat avec une équipe suédoise**, interrogent aujourd’hui le lien entre la syntaxe linguistique et la maîtrise des outils (bricolage, travaux manuels…). Ces deux compétences seraient-elles stimulées par une seule et même zone du cerveau ?

Pour répondre à cette question, les chercheurs ont fait passer des tests à des volontaires. Chacun a dû manipuler des pinces mécaniques puis passer une épreuve de syntaxe en français. Grâce à l’IRM effectuée dans le même temps, les scientifiques ont observé « les réseaux cérébraux propres à chaque tâche, mais aussi communs aux deux tâches ».

Résultat, certaines zones « de la motricité fine sont aussi celles du traitement du sens des mots ». Ce point va à l’encontre de l’idée jusqu’ici acquise en neurosciences selon laquelle « le langage [est considéré] comme une habileté très complexe, mobilisant des réseaux cérébraux spécifiquement dédiés à cette faculté ».

Le cognitif et le moteur sont liés

Et la corrélation va plus loin. L’entraînement de l’une de ses compétences a le pouvoir d’améliorer la seconde.

La preuve : chaque volontaire a dû manipuler pendant 30 minutes une pince mécanique avant et après le test syntaxique. Un groupe contrôle a été formé à partir de volontaires pratiquant uniquement le test syntaxique. Résultat, les scores de compréhension étaient meilleurs dans le groupe bénéficiant des exercices de manipulation des pinces. L’inverse (une session de manipulation des pinces précédée et suivie d’un exercice de syntaxe) a aussi été testé. « Un entraînement moteur avec un outil améliore nos capacités à comprendre la syntaxe de phrases complexes et à l’inverse, un entraînement syntaxique améliore les performances d’utilisation d’outils », concluent les chercheurs.

A noter : dans quelle aire thérapeutique cette découverte pourrait-elle s’avérer pertinente ? En neurologie notamment, auprès « des patients ayant perdu une partie de leurs compétences langagières », les jeunes présentant « des troubles du langage » par exemple.

* Champ d’étude dans lequel les scientifiques s’intéressent à l’évolution de l’anatomie du cerveau de nos ancêtres 

**Inserm, CNRS, Université Claude Bernard Lyon, Université Lumière Lyon 2

***Karolinska Institute, Suède

  • Source : Inserm, Science, le 11 novembre 2021

  • Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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