Pervers narcissique : qu’est-ce que c’est ?
21 septembre 2022
Le pervers narcissique désigne un homme ou une femme qui établit avec sa victime une relation d’emprise très destructrice afin de combler son propre manque d’estime personnelle. Même si l’expression est devenue très « à la mode » et entre cette année dans le Petit Larousse, elle doit être maniée avec prudence.
« La perversion narcissique est une pathologie de la personnalité, repérée et nommée pour la première fois dans sa forme moderne par le psychanalyste Paul-Claude Racamier en 1986 », rappelle Anne Clotilde Ziégler, psychothérapeute, dans son livre, « Pervers narcissiques, bas les masques ». Dans la définition, très psychanalytique, que Racamier en donne, le pervers narcissique est un sujet qui met en place « une organisation durable ou transitoire caractérisée par le besoin, la capacité et le plaisir de se mettre à l’abri des conflits internes et en particulier du deuil, en se faisant valoir au détriment d’un objet manipulé comme un ustensile et un faire-valoir ».
Plus concrètement, il s’agit d’un prédateur qui se choisit une cible (« sa » victime, car il n’agit pas ainsi avec tout le monde), l’isole des autres afin de mieux asseoir son emprise et prend plaisir à la rabaisser et à la faire souffrir, jusqu’à la détruire. Ce peut-être un ou une amoureuse, mais aussi un(e) ami(e), un(e) supérieur(e) hiérarchique au travail ou encore un membre de sa famille…
« La relation d’emprise est souvent le premier signe permettant de reconnaître la présence du pervers narcissique », précise encore Anne Clotilde Ziégler. Et, fait marquant, c’est la souffrance de sa proie qui le révèle : la victime – qui n’y est pour rien ! – perd peu à peu toute estime d’elle-même et doit souvent entreprendre un long travail psychologique de reconstruction. Quant au pervers narcissique, il ne va jamais en thérapie : pour lui, tout va bien ! Il n’a d’ailleurs même pas conscience du mal qu’il peut faire – ou se croit dans son bon droit.
Gare à l’abus de langage !
Depuis sa « découverte », l’expression « pervers narcissique » a un franc succès : nombreux sont ceux qui connaissent un pervers narcissique ou une personne qui a eu affaire à un tel personnage. Le terme vient même d’entrer dans le Petit Larousse (édition 2023)… Mais attention, car le diagnostic de « pervers narcissique » est souvent attribué à tort et à travers. « Dans les usages ordinaires, “pervers narcissique” = “personnalité à fuir” (ou “à combattre” avec des moyens appropriés s’il n’est pas possible de fuir) », résume Marc Joly, un sociologue du CNRS qui s’est spécialisé dans l’étude du processus social qui a popularisé la notion de « pervers narcissique », dans un article paru sur le site The Conversation.
« Il est primordial de ne pas voir des manipulateurs partout. Le risque est triple : devenir exagérément méfiant, dans une logique un peu paranoïaque ; ne pas prendre la peine de réguler les conflits dans une relation où pourtant c’est possible ; affadir la notion pour en faire une désignation vague des personnes avec lesquelles on ne parvient pas à s’entendre… », conclut Anne Clotilde Ziégler. Mieux vaut, lorsque l’on souffre dans une relation, chercher de l’aide auprès d’un professionnel.
À savoir : Si vous pensez être victime d’un pervers narcissique, vous trouverez appui et conseil auprès d’associations de victimes, telles l’association de défense contre le harcèlement moral (ADCHM), l’aide aux victimes de manipulateurs pervers narcissique (AVMPN) ou l’association AJC contre les violences morales intrafamiliales.
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Source : « Pervers narcissiques, bas les masques » - Anne Clotilde Ziegler - Éditions Solar
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Ecrit par : Clara Delpas - Édité par : Vincent Roche