Peut-on être vraiment “accro” à l’adrénaline?
01 août 2022
Un pompier volontaire arrêté fin juillet en Ardèche a reconnu avoir allumé les feux de forêt en raison d'un "besoin d'adrénaline et de sensations fortes". Est-ce plausible ?
L’adrénaline ? C’est ce que notre corps produit en réaction à la peur. Produite par les surrénales, elle accélère les battements cardiaques, dilate les pupilles, et permet au corps de réagir efficacement. Elle est évidemment à l’œuvre si vous pratiquez un sport extrême (escalade, saut en parachute, etc…). Pour autant, l’adrénaline n’est pas une drogue et les amateurs de sensations fortes ne sont pas des drogués, même s’ils peuvent avoir en commun la recherche de sensations toujours plus fortes, l’ impulsivité, et une fréquente envie de recommencer !
Le goût du risque est un trait de caractère, pas une pathologie
« La recherche de sensations fortes ne fait pas partie des pathologies décrites dans la CIM, la classification internationale des maladies, de l’OMS. C’est un indice de ce que nous appelons la ‘personnalité avec recherche de sensations fortes’, ce n’est pas un diagnostic médical ! », rappelle le Pr Michel LeJoyeux, chef du service de Psychiatrie et d’Addictologie à l’Hôpital Bichat.
Quant au « besoin d’adrénaline » qui pourrait suggérer une éventuelle dépendance, aucune base scientifique ne permet à l’heure actuelle de l’étayer ! « D’une part, on n’a pas à ma connaissance retrouvé de modifications régulières de l’adrénaline chez les personnes qui ont des comportements impulsifs », précise le spécialiste. « D’autre part, l’adrénaline n’est pas une molécule qui crée une addiction. La dépendance à l’adrénaline n’existe donc pas en tant que maladie ! »
Pyromane… ou incendiaire ?
Il est usuel qu’acculé par la justice et aux abois, un criminel invoque un motif médical pour justifier ses actes. Des tas de voleurs se décrivent comme kleptomanes par exemple. Comme la kleptomanie, la pyromanie est une pathologie classée dans les troubles du contrôle des impulsions. Elle a été associée par les psychanalystes à un sentiment de frustration sexuelle qui expliquerait le passage à l’acte, incontrôlé, pour libérer la tension accumulée. Mais peu d’études ont été en réalité menées sur les pyromanes. Il est en tout cas sûr qu’ils se distinguent des incendiaires, qui eux, allument des feux en toute conscience, pour se venger, par vandalisme… ou tout simplement pour en tirer profit. Un pompier volontaire incendiaire est sans doute plus motivé par les indemnités versées lorsqu’il intervient sur les feux que par l’adrénaline produite en craquant l’allumette !
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Source : Interview du Pr Michel Lejoyeux le 29/07, auteur de l'ouvrage "En bonne santé, avec Montaigne", paru aux Ed.Robert Laffont
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Ecrit par : Clara Delpas — Édité par : Emmanuel Ducreuzet