Plus intense, le foot moderne use les ischio-jambiers
12 décembre 2022
Le cerveau des joueurs de foot n’est pas le seul à souffrir. Leurs muscles ischio-jambiers aussi, selon une étude tout juste parue dans le British Journal of Sports Medicine, financée par l’UEFA. Elle révèle qu’en 20 ans, la proportion de blessures aux ischio-jambiers des joueurs professionnels masculins a doublé.
2001-2022 : c’est la période retenue par les auteurs suédois de cette étude, qui ont inclus près de 4 000 joueurs issus d’une cinquantaine d’équipes masculines d’une vingtaine de pays européens. Point commun de ces joueurs professionnels : ils font partie de la cohorte Elite Club Injury Study, du nom de ce programme mis en place par l’UEFA dans le but de réduire les blessures liées à la pratique du football à haut niveau… et à de plus en plus forte intensité.
Celle-ci n’est pas sans conséquence sur la santé des joueurs, semble confirmer l’étude publiée dans le British Journal of Sports Medicine. Les auteurs se sont concentrés sur les blessures aux muscles ischio-jambiers, très fréquentes chez les joueurs de football. Elles surviennent lorsque les tendons ou les grands muscles situés à l’arrière de la cuisse sont froissés ou déchirés. Ce groupe musculaire est très sollicité lors des phases d’accélération.
Deux fois plus de blessures
Au total, plus de 2 600 blessures aux ischio-jambiers ont été recensées pendant toute la période étudiée, aussi bien en match qu’à l’entraînement, indiquent les chercheurs. Mais si, pendant la période 2001-2014, le nombre de blessures est resté relativement stable, il a fortement progressé au cours des années suivantes. Les atteintes aux ischio-jambiers représentaient ainsi 12% du total des blessures au début des années 2000, et 24% sur la saison 2021-2022.
Pour les joueurs (et leurs équipes), les durées de repos consécutifs à ces blessures ont également doublé, pour une durée moyenne de 13 jours. Autre constat : les récidives précoces (dans les deux mois suivant le retour sur le terrain) représentaient plus des deux tiers des récidives, qui représentaient elles-mêmes un cinquième des blessures aux ischio-jambiers.
Travail toute l’année
Pour expliquer l’accroissement de ce type de blessures, les chercheurs avancent plusieurs hypothèses : l’augmentation de « l’intensité du football masculin d’élite », avec un plus « grand volume d’actions de haute intensité » au cours d’un match, et des courses plus rapides : « dans notre étude, 61% des blessures aux ischio-jambiers sont survenues alors que le joueur courait/sprintait », indiquent les auteurs.
Qui, sans établir de lien de causalité, suggèrent également que les calendriers surchargés des joueurs pourraient expliquer l’augmentation de ces blessures. « Les joueurs professionnels travaillent désormais toute l’année, à l’exception d’une pause de 4 à 6 semaines entre les saisons », pendant lesquelles certaines équipes participent, à l’autre bout du monde, à des tournées d’avant-saison qui diminuent encore leur temps de repos et de récupération.
Une tendance que déplorent depuis longtemps de nombreux spécialistes du football, et qui va bientôt concerner certains internationaux engagés dans la Coupe du monde au Qatar. S’ils évoluent dans une équipe qui dispute également une compétition européenne durant la saison 2022-2023, leur nombre total de matchs sur la saison pourrait dépasser la soixantaine.