Pourquoi la chimiothérapie nuit à la fertilité ?

26 avril 2022

Comment expliquer les effets délétères de la chimiothérapie sur la fertilité ? Une équipe française s’est intéressée aux mécanismes impliqués chez l’homme. Objectif : mieux prévenir les effets secondaires des traitements et restaurer la fertilité chez les survivants du cancer.

L’infertilité « peut concerner aussi bien les hommes que les femmes et n’a cessé d’augmenter ces dernières années », rappellent des spécialistes de l’Inserm, du CNRS et de l’Université de Clermont-Ferrand (Auvergne)*.

Parmi les différentes causes, « le cancer et ses traitements, susceptibles d’altérer la fertilité, de manière temporaire ou définitive selon la localisation du cancer et la nature des protocoles », précise l’Institut national du Cancer (INCa). Ce phénomène est tel qu’il existe aujourd’hui un suivi en préservation de la fertilité parmi les soins proposés aux patients atteints d’un cancer**.

Ainsi, « la chimiothérapie a été pointée du doigt comme ayant des effets particulièrement délétères sur la fertilité des femmes comme sur celle des hommes », détaille le Dr David Volle (Inserm). Piste aujourd’hui à l’étude pour comprendre ce mécanisme du côté de l’infertilité masculine : le rôle joué par « un récepteur que l’on retrouve sur les cellules germinales masculines à l’origine des spermatozoïdes ». Ce récepteur, nommé TGR5, joue aussi un rôle important « dans la glycémie et la dépense énergétique ». Il est d’ailleurs suspecté d’être impliqué dans d’autres maladies « comme le diabète et l’obésité ».

Une augmentation de la stérilité chez la souris 

Pour observer l’impact de ce récepteur sur les gamètes mâles, les scientifiques ont travaillé sur un modèle murin.

Les chercheurs ont exposé les souris à la chimiothérapie (busulfan). Ce traitement a « induit la mort d’une partie des cellules germinales chez des souris saines, affectant ainsi leur fertilité », souligne le Dr Volle. « Le fait que ce soient les cellules germinales, encore indifférenciées, qui soient touchées est particulièrement problématique car l’on touche à la réserve des cellules produisant les gamètes. Cela peut réduire leur renouvellement et contribuer à l’infertilité post-chimiothérapie ».

Puis les scientifiques ont travaillé sur des souris génétiquement modifiées sur lesquels les récepteurs TGR5 étaient absents. Résultat, « les effets de la chimiothérapie sur les cellules germinales sont atténués. Cela se traduit par un retour accéléré de la fertilité chez ces souris traitées au busulfan par rapport aux souris témoins ».

Pour mieux prévenir les impacts délétères de la chimiothérapie sur la fertilité, il est aujourd’hui prioritaire d’en « comprendre les mécanismes ». L’objectif étant de « restaurer la fertilité chez les survivants du cancer » et de préserver au maximum les chances de concevoir des hommes et des femmes.

* laboratoire Inserm Génétique, reproduction et développement 

**les principales mesures de préservation de la fertilité reposent sur le recueil et la conservation par congélation de cellules reproductrices (gamètes ou tissus germinaux, c’est-à-dire tissu testiculaire ou ovarien) dans des établissements spécialisés appelés Cecos (données INCa)

  • Source : Inserm, Advanced Science, le 20 avril 2022 - Institut national du Cancer (INCa)

  • Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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