Prescription d’activité physique adaptée : et le financement ?

03 janvier 2017

Très attendu des professionnels de la santé et du sport, le décret relatif à la prescription d’activité physique adaptée (APA) par le médecin traitant est centré sur les modalités d’accompagnement des patients. En revanche, pas de trace d’une quelconque prise en charge financière, ce qui pose question dans un contexte de lutte contre les inégalités sociales de santé. Entre « avancée » et « occasion manquée »…

Actuellement, une quarantaine de villes françaises bénéficient d’un dispositif de prescription de sport sur ordonnance. En 2012, Strasbourg a été la première à se lancer, sous l’impulsion du Dr Alexandre Feltz, adjoint au maire en charge de la santé publique. Il a suivi de près la rédaction du décret qu’il considère comme une « vraie avancée. Cette publication était fondamentale afin qu’il y ait application d’une loi qui concerne 10 millions de patients en affection de longue durée (ALD) ».

Un financement au bon-vouloir des collectivités ?

Le grand point d’interrogation de ce décret reste le financement. Aucune cotation au niveau de l’Assurance-maladie n’est mentionnée, ni même envisagée. En l’état, cela signifie qu’un patient devra prendre à sa charge les séances d’activité physique adaptée dont il bénéficiera !

« C’est évidemment le grand point d’interrogation », n’élude pas le Dr Feltz. Lequel parie sur les réseaux tels qu’ils existent dans sa ville et qui permettent le financement du dispositif. A Strasbourg, la municipalité intervient à hauteur de 62% sur un budget annuel qui s’élève à 241 000€. Le complément est issu de l’Agence régionale de santé (ARS – 17%), du régime local d’Assurance-maladie (8%) et de la Direction régionale de la jeunesse des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS- 4%). Si bien que le reste à charge se situe entre 20 et 100 euros annuels par patient, selon les revenus. Dans la foulée du décret, une directive ministérielle est évoquée pour inciter ce genre de regroupements. Mais rien n’est vraiment acté.

« Un premier pas mais… »

De son côté, Jean-Marc Descotes, co-fondateur de l’association CAMI sport et cancer, reconnaît la pertinence de ces dispositifs mais s’interroge sur leur durabilité. « Ils répondent à des volontés politiques et à des priorités fixées en fonction de ces volontés. Mais demain ? Que se passera-t-il si de nouveaux acteurs arrivent dans ces collectivités et décident de transférer les budgets sur d’autres priorités ? ».

Plus largement, selon lui, ce décret représente « un premier pas qui acte la place du sport dans le champ de la santé ». Mais à cause de ces problématiques de financement, « il constitue une occasion manquée. Si l’on considère que le sport est un médicament, remboursons-le comme tel » ! De la même façon, Jean-Marc Descotes regrette que le texte ne fasse pas mention de formations complémentaires pour tous les professionnels intervenants, en fonction des pathologies. De façon à ce que la prise en charge soit conforme aux besoins réels du patient ». Il fait notamment référence au DU sport et Cancer, créé par sa structure et qui vise à former des éducateurs médico-sportifs en cancérologie. Autant de messages qu’il compte bien faire passer aux candidats à l’élection présidentielle du printemps 2017…

  • Source : Interview du Dr Alexandre Feltz, 2 janvier 2017 – Interview de Jean-Marc Descotes, 3 janvier 2017

  • Ecrit par : David Picot – Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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