Prestige : du pétrole, du nickel, du vanadium… et des hommes !

17 janvier 2003

« L’exposition au pétrole du Prestige a des effets néfastes sur la santé ». Une étude publiée le 2 janvier dernier en Espagne, alerte le grand public sur la toxicité des hydrocarbures qui souillent actuellement la côte Atlantique.
Pour la première fois, un rapport du Haut Conseil espagnol à la Recherche, relayé par The Lancet fournit des informations sur les métaux lourds qui entrent dans la composition de chargement du Prestige. En plus des fameux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), dont la toxicité est bien connue, les auteurs ont relevé des traces de zinc, de nickel mais aussi de vanadium.

Si le zinc n’est pas carcinogène, le nickel, lui est classé par le Centre de Recherche International sur le Cancer (CIRC) de Lyon comme carcinogène possible ou carcinogène, selon qu’il se présente sous sa forme « métal » ou « ionique ».

Le troisième de la bande serait l’obscur vanadium. D’après le Service des monographies du CIRC, « c’est une surprise de retrouver du vanadium au milieu des métaux lourds ». Très toxique par voie pulmonaire, le potentiel carcinogène du vanadium est encore inconnu. Il sera bientôt étudié par les chercheurs du CIRC, lesquels recommandent toutefois la plus grande prudence avant de connaître les concentrations réelles.

A partir de ces données, quels dangers ces substances peuvent-elles entraîner sur la chaîne alimentaire ? Pour l’Agence française de Sécurité sanitaire des Aliments (AFSSA), plus que les poissons, « les coquillages, qui ont une faible capacité à dégrader les HAP (et les métaux lourds, n.d.l.r) constituent une cible particulièrement sensible ». Tout comme les crustacés, les algues et le sel, d’ailleurs.

Encore faudrait-il en consommer de grandes quantités. Comme le souligne l’AFSSA, « le danger concerne essentiellement la toxicité chronique, c’est-à-dire la consommation régulière de produits contaminés, qui serait susceptible de provoquer à long terme, des maladies. C’est la raison pour laquelle (…) une surveillance doit être mise en oeuvre et les produits qui ont pu être souillés par la marée noire, retirés du marché ».

Tant que les recherches en cours n’ont pas abouti, la seule certitude c’est qu’il est donc impossible de garantir la sécurité alimentaire des produits issus de la mer. En tout cas, dans le cadre d’une consommation régulière.

Preuve que l’inquiétude existe et que les données scientifiques manquent cruellement, l’Agence française, en collaboration avec son homologue ibérique, le ministère espagnol de la Santé et l’OMS passent actuellement au crible tous les produits de la mer repêchés en Galice. Un vaste travail dont l’objectif est d’évaluer avec précision les éventuelles répercussions sur la chaîne alimentaire. Une information puisée dans le Lancet et que l’AFSSA n’avait pas jugée utile de retransmettre dans un communiqué de presse…

Hier, la préfecture de la Gironde a autorisé le ramassage, le transport et la commercialisation des huitres et autres coquillages dans le bassin d’Arcachon. La préfecture a assuré qu’il n’ y avait “de pétrole visible dans le bassin“. Une décision qui pose plus de questionsqu’elle n’apporte de réponses…

  • Source : The Lancet, Vol. 361, 11 janvier, CIRC, AFSSA

Aller à la barre d’outils