Psychiatrie : des professionnels dénoncent une prise en charge défaillante

21 juillet 2023

Alors que les troubles psychiatriques ont augmenté notamment chez les jeunes après la crise du Covid-19, les personnels soignants dénoncent fréquemment un manque de moyens humains et matériels pour traiter dignement les patients. Une cinquantaine de soignants signent ce vendredi, une tribune dans le Parisien.

« La contrainte psychiatrique, les sangles et l’isolement ne sont pas des soins ». Dans une tribune publiée vendredi 21 juillet dans le Parisien, une cinquantaine de psychiatres, psychologues et patients alertent sur la prise en charge psychiatrique en France. « Faut-il continuer d’accepter le décuplement de violences institutionnelles, le non-accueil, la transformation de nombre de services de soin en véritable machine à broyer les personnes malades et celles qui s’en occupent ? », interrogent-ils. Les signataires dénoncent des lieux d’accueil pour enfants et adultes « pleins à craquer », une situation dans laquelle toute prévention serait rendue impossible.

Ils dénoncent des pratiques normalement exceptionnelles qui deviennent une norme comme la contention, l’isolement et l’hospitalisation sans consentement. Si telle ou telle autre décision est prise, « il s’agit alors d’une mesure lourde qui devrait toujours s’accompagner d’une assistance psychique et — en aucun cas — s’y substituer. Si tel n’est pas le cas, ces pratiques relèvent de la maltraitance ».

Des alertes qui se répètent

Ainsi plaident-ils pour replacer le patient et ses proches au centre du soin et leur rendre le droit à la parole lors « de décisions médiales et administratives prises entre les murs ». Les auteurs de la tribune demandent également « une remise en question de la culture de l’entrave et de l’enfermement » et dénoncent « des prises en charge à court terme, et trop souvent d’une grande brutalité ». Selon eux, ce système nourrit une défiance grandissante à l’égard des soignants et « génère une souffrance éthique insondable parmi les professionnels attentifs à ces enjeux ».

Voilà des années que les professionnels alertent les pouvoirs publics des soins psychiques en France. Le 21 juin dernier, c’est un collectif de jeunes psychiatres qui dénonçait le délitement de la prise en charge psychiatrique dans les services hospitaliers. « Notre constat est celui d’une psychiatrie sinistrée : ‘beds managers’ pour pallier la fermeture de 60 % des lits depuis les années 80 (l’objectif premier du soin étant désormais de ‘faire sortir’ le patient), défaut de formation, locaux vétustes, manque de moyens humains et financiers ». En mars 2022, une autre tribune de soignants, dans le Parisien, interpellait la Première ministre Elisabeth Borne, « Créons des postes pour éviter le naufrage ! ».

La santé mentale en chiffres : selon le ministère de la Santé, la psychiatrie représente 2,4 millions de personnes prises en charge en établissement de santé. En France, en 2022, 3 millions de personnes souffrent de troubles psychiques sévères. 15 % des 10-20 ans ont besoin de suivi ou de soins et 7,5 % des Français de 15 à 85 ans ont souffert de dépression au cours des 12 derniers mois. Chaque année les troubles mentaux coûtent 19,3 milliards d’euros à l’Assurance maladie.

  • Source : Le Parisien 21 juillet 2023, Le Monde 21 juin 2023, Santé publique France, Ministère de la Santé

  • Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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