Régimes amincissants : des résultats rapides ne sont pas gage d’efficacité
26 juin 2023
De nombreuses publicités vantant de soi-disant régimes miracles promettent des résultats visibles en quelques semaines. Mais pour Matthieu Marty, diététicien-nutritionniste et doctorant en physiologie de la nutrition et de l'exercice à Paris, cette rapidité n’est pas un gage de qualité et d’efficacité. Il nous explique pourquoi.
Doit-on accorder du crédit aux régimes qui promettent de perdre plusieurs kilos en une semaine ?
Matthieu Marty : C’est jouer sur l’ignorance des gens. Un régime se définit par une alimentation inhabituelle qui a un début et une fin dans le temps. Cette dernière notion est importante car elle permet de comprendre que ce n’est ni une habitude qui s’installe, ni un mode de vie qui s’améliore durablement. Or pour perdre du poids il faut du temps : du temps pour que le poids perdu ne soit quasiment que du gras et pas du glycogène (la réserve d’énergie dans les muscles), de l’eau (qui sert à stocker l’énergie dans les muscles et le foie), ou du muscle. Malheureusement les promesses de régimes amincissants sont souvent séduisantes car on perd effectivement du poids rapidement… en tout cas sur la balance. Mais le poids perdu, lorsqu’il est rapide, est majoritairement du glycogène, de l’eau intramusculaire et sous cutanée et du muscle.
Quels sont les risques de ces régimes amaigrissants ?
Matthieu Marty : Ils vont impacter certains phénomènes physiologiques et comportementaux : un dérèglement du pondérostat, cette zone dans le cerveau qui régule le poids et la faim, une perte de muscle (et donc une perte du plus gros consommateur d’énergie), une diminution aiguë de la leptine (l’hormone de la satiété) ainsi qu’une frustration inconsciente créée par les interdits et injonctions du régime… Vous vous apercevrez que la totalité des personnes ont repris du poids ensuite, car cela n’est pas une question de volonté mais une question de physiologie. Il est donc important de comprendre que pour un objectif qui prend du temps (le fait de perdre du gras) il faut prendre son temps pour bien faire les choses, et ne pas tomber dans un cercle vicieux de perte et reprises de poids aiguës.
Une alimentation équilibrée et la pratique d’une activité physique restent-elles les meilleurs moyens de perdre du poids sainement ?
Matthieu Marty : Il faut commencer par comprendre son objectif et se dissocier au mieux du lobbying, des promesses des coachs non diplômés et des publicités. La meilleure façon de perdre du gras est en effet d’améliorer son comportement et sa vision de l’alimentation (avoir des objectifs sains et réalistes ; comprendre que ce n’est ni un repas, ni un aliment qui fait grossir ou maigrir), améliorer son alimentation qualitativement (cuisiner, manger diversifié, augmenter la part de fruits et légumes et produits complets qui sont satiétogènes, privilégier les aliments bruts aux aliments ultra transformés…) et bouger autant qu’on le peut (se déplacer en marchant, à vélo, prendre les escaliers, faire un sport qu’on aime…).
En adoptant ces méthodes, les résultats peuvent-ils être visibles rapidement ?
Matthieu Marty : Lorsqu’on souhaite perdre du gras, on va dans les premiers jours perdre de l’eau et des réserves d’énergie. Voilà pourquoi le poids sur la balance n’est pas un indicateur très intéressant. Il est plus important de se baser sur ses ressentis physiques, sur sa confiance en soi que sur un chiffre inscrit sur un pèse-personne.
Mais on peut dire que les résultats internes vont commencer à se voir au bout de 1 à 3 semaines juste (moins de coups de fatigue quotidiens par l’apport en légumes et fruits qui vont réguler la glycémie, plus d’énergie et de concentration sur le long terme par des féculents complets, capacité à récupérer et plus s’entraîner par un apport en protéines fréquent et de qualité…). Les résultats physiques seront quant à eux visibles au fur et à mesure des semaines : en 3 ou 4 mois on peut atteindre un changement très motivant (correspondant à 2-3 kg max de perdu par mois.
Y a-t-il une différence de rythme de perte de poids entre ceux qui ont beaucoup de kilos à perdre et ceux qui n’en ont que quelques-uns ?
Matthieu Marty : Plus on est en surpoids, plus chaque changement dans l’alimentation ou l’activité physique sera visible et efficace. Mais que ce soit une personne en surpoids ou obèse, il ne faut pas perdre de poids trop rapidement bien que cela soit tentant. N’oublions pas qu’une personne obèse peut être dénutrie. Et pour les personnes non obèses, l’on recommande une perte de 2-3 kilos par mois. Au delà, la majorité du poids perdu sera du muscle.
N’oubliez pas que – physiologiquement – tout ce qui arrive vite, repars vite souvent vite. Aller trop vite dans la perte de poids aura indéniablement et insidieusement un impact (social, comportemental, biologique). Le corps doit s’habituer pour que cela devienne durable et donc réussi. Et il ne faut pas oublier la notion de plaisir qui n’est pas une option mais un besoin.
-
Source : Interview de Matthieu Marty, diététicien-nutritionniste et doctorant en physiologie de la nutrition et de l'exercice à Paris
-
Ecrit par : Vincent Roche – Edité par : Emmanuel Ducreuzet