











Le français pour l’heure. Pas les Français. Mais le phénomène va bien au-delà des querelles d’influence et ne laisse pas d’être préoccupant. A tel point que depuis quelques années même les Britanniques s’en émeuvent. Car leur langue aussi est en péril…
L’idiome en cours dans les cénacles onusiens n’a en effet plus grand chose à voir avec la langue de Shakespeare. Ni avec celle de l’Oncle Sam. Toutefois et même si le dévoiement linguistique actuel peut préoccuper les puristes, le français lui est en butte à un véritable processus d’éradication. En voici quelques preuves.
Une rapide visite sur le site de l’OMS -l’agence de l’ONU en charge des questions de santé donc- permet de noter que notre langue y est singulièrement mise à mal. Le service d’information aux médias par exemple, évoque les impératifs liés à “la realization (sic) des huit objectifs du Millénaire pour le développement…“. Nous y apprenons aussi que “des milliers d’infants (sic) du Darfour vont être vaccines (sic) contre la rougeole dans des zones touchées par le conflit… “. Le génocide soudanais est déjà empreint d’une barbarie sans nom. N’y ajoutons pas nos propres barbarismes…
Ni billevesées, ni querelles de spécialistes. Si vous vous rendez sur la page d’accueil en français de l’Organisation, vous y trouverez un appel à candidatures destiné en quelque sorte, à assurer la relève des cadres de l’action sanitaire. Intitulé “Appel à candidatures : programme des jeunes cadres de l’OMS” il est on ne peut plus prometteur. Mais la petite mention en caractères bleus, qui figure discrètement à côté, laisse pantois. “En anglais” stipule-t-elle… Ainsi l’OMS, forte de 192 Etats Membres et de 6 langues dont deux -l’anglais et le français- sont ses langues fondatrices, ne sait pas adresser dans leur langue l’appel à candidature destiné aux futurs cadres des pays francophones ?
Tous à l’anglais?
Il n’est pas question de faire de l’anglophobie rétrograde. L’anglais d’ailleurs, est lui aussi bien mal loti en la matière. Mais il y a péril. Certes l’Organisation internationale de la Francophonie -qui fait essentiellement parler d’elle à l’occasion de Sommets aussi voyants que coûteux- ne paraît guère s’en émouvoir. Le gouvernement français non plus d’ailleurs, qui ne s’implique guère dans les efforts de diffusion du français sur le terrain. Mais sur les 53 pays en question un bon nombre figurent parmi les moins favorisés de la planète ou sont en voie d’émergence.
Ce sont eux qui auront besoin demain des “cadres de direction sanitaire” dont l’OMS affirme entreprendre ici le recrutement. Or qu’on se le dise : pour administrer leur santé demain, ces pays devront se mettre à l’anglais. Faute de quoi ils seront rayés des rôles de l’OMS, pour commencer, puis de tous les circuits de décision…
Source : Eurosurveillance, vol. 8, issue 33
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