Sarcomes : une tumeur, deux avis…
27 novembre 2012
Parmi les nombreux types de cancers, certains s’avèrent particulièrement compliqués à diagnostiquer. C’est le cas des sarcomes, des tumeurs rares et complexes qui se se développent dans le tissu osseux, les muscles ou certains tissus mous. Près de 5 000 cas sont diagnostiqués chaque année en France. Mais souvent, les sarcomes sont détectés trop tard ou font l’objet d’une erreur de diagnostic. L’équipe du Pr Jean-Michel Coindre, anatomo-pathologiste à l’Institut Bergonié de Bordeaux et membre du Réseau de référence en Pathologie des Sarcomes des tissus mous et des viscères (RRePS), milite pour la mise en place d’une double lecture systématique des biopsies.
Pourquoi faire analyser, par deux fois, un prélèvement effectué sur une tumeur soupçonnée d’être un sarcome ? Pour démontrer la pertinence d’une telle procédure, l’équipe de Jean-Michel Coindre a mené une étude portant sur 3 621 patients. Tous avaient reçu un premier diagnostic de sarcome, émis par un anatomopathologiste en 2010. L’opinion d’un second praticien a ensuite été demandée.
« Une discordance majeure de diagnostic a été observée chez 438 patients, soit dans 1 cas sur 8 », indiquent les auteurs. Et dans plus de la moitié de ces erreurs (255 patients), un diagnostic de sarcome avait été posé alors qu’il s’agissait d’une lésion bénigne, ou inversement. Dans ces deux situations, « les patients risquaient de subir un traitement anticancéreux sans raison, ou (au contraire) de perdre des chances de guérison », soulignent-ils. « D’où l’intérêt d’une seconde opinion ».
Erreurs en chaîne
Si l’avis d’un second pathologiste sur la nature de la tumeur est important, le premier diagnostic de la grosseur signalée par le patient est souvent posé dans le cabinet du généraliste. Ensuite, il est trop fréquemment dirigé vers un chirurgien mal informé. « En effet, environ les deux tiers des patients porteurs d’un sarcome sont opérés avant que le diagnostic n’ait été établi par une biopsie », explique le Pr Coindre. Et cette intervention est trop souvent effectuée au risque de disséminer la tumeur, réduisant ainsi les chances du patient. « En outre, si prélèvement il y a, celui-ci n’est pas toujours effectué dans les règles de l’art. Il doit impérativement être pratiqué par microbiopsie, et par une équipe entraînée », explique Jean-Michel Coindre.
« Toute tumeur des tissus mous située dans les muscles ou à l’intérieur du tronc, ou bien mesurant plus de 5 cm, doit être considérée comme à risque d’être un sarcome », prévient-il à l’attention de tous les médecins. Dans ce cas, « la grosseur doit bénéficier d’une exploration par imagerie et d’une microbiopsie pour parvenir à un diagnostic ferme, avec l’avis de deux anatomo-pathologistes. Enfin, la décision du traitement doit être prise dans le cadre d’une réunion multidisciplinaire », conclut-il.