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Le syndrome de l’intestin irritable (SII) concerne environ 4 % de la population mondiale, majoritairement des femmes. Dû à une hypersensibilité du côlon, il se traduit par des douleurs abdominales, une constipation ou une diarrhée voire les deux, et des ballonnements.
Son impact sur la qualité de vie peut être très important. C’est pourquoi, en plus des traitements médicamenteux, de nombreux patients se tournent vers des thérapeutiques complémentaires, avec plus ou moins de succès. C’est ainsi que, par exemple, plus de 40 % d’entre eux souffrant d’un intestin irritable modéré à sévère ont essayé l’ostéopathie viscérale, d’après l’association des patients souffrant du syndrome de l’intestin irritable (APSSII). Si l’efficacité de plusieurs traitements complémentaires est prouvée scientifiquement, ça n’est pas le cas pour d’autres, et notamment l’ostéopathie viscérale dont la pratique vient d’être analysée dans un essai randomisé français présenté fin mars 2025.
De petites études ont évalué l’ostéopathie viscérale chez des personnes atteintes du syndrome de l’intestin irritable. Leurs résultats, variables, ont parfois mis en évidence une amélioration des symptômes, un impact sur la sensibilité rectale ou encore une réduction de la sévérité du SII.
Afin d’évaluer de manière plus fiable l’intérêt de cette approche, l’étude française IBSOMT (Effet de l’ostéopathie viscérale sur la sévérité des symptômes dans le syndrome de l’intestin irritable), présentée lors du congrès de gastroentérologie (JFHOD) fin mars 2025, a testé son efficacité dans le SII modéré à sévère. Le protocole suivi, conforme aux pratiques habituelles, consistait en trois séances espacées de deux semaines sur un mois.
« Nos analyses montrent que l’ostéopathie viscérale n’apporte pas de bénéfice supplémentaire par rapport au placebo, qui, comme dans tout trouble fonctionnel, affiche un taux d’amélioration d’environ 30 à 40 %. Que ce soit pour la réduction de la sévérité du SII, l’amélioration des comorbidités psychologiques ou de la qualité de vie, aucun avantage n’a été observé grâce à l’ostéopathie viscérale, auprès de patients souffrant d’un SII d’intensité moyenne à sévère et selon notre protocole », conclut le Dr Fabien Wuestenberghs, gastro-entérologue à l’Hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis) et responsable de l’étude. Il ne décourage pas pour autant les patients de la tester et reconnaît qu’individuellement certains patients peuvent malgré tout percevoir une amélioration.
L’hypnose thérapeutique peut contribuer à normaliser la sensibilité viscérale et agir sur les contractions intestinales. Elle influence également certaines activations cérébrales anormales en réponse à une stimulation rectale douloureuse.
Son efficacité a été particulièrement mise en évidence dans une étude anglaise portant sur plus de 1 000 patients atteints d’un syndrome de l’intestin irritable résistant aux traitements médicaux. Après trois mois de séances hebdomadaires d’hypnose, 76 % des participants ont constaté une amélioration de leurs symptômes, avec une diminution des douleurs et des ballonnements mais aussi une meilleure qualité de vie. En plus d’un impact positif sur le transit, l’étude souligne les effets bénéfiques de l’hypnose sur l’anxiété et les troubles du sommeil.
D’après le comité scientifique de l’APSSII, « ce traitement est un des plus efficaces disponibles pour le SII, car même chez des patients sévères chez lesquels les traitements médicamenteux classiques ont échoué, on observe malgré tout 50 à 60 % de réponses positives. De plus, toutes les formes de SII (constipation, diarrhées ou mixte, ndlr) peuvent être améliorées ».
Pour cela, l’hypnothérapeute doit apprendre au patient à pratiquer l’autohypnose, afin de prolonger dans le temps les bénéfices obtenus.
Comme l’hypnose, la thérapie cognitive et comportementale (TCC) est une approche recommandée, en particulier pour gérer l’anxiété et le stress provoqués par les symptômes du syndrome de l’intestin irritable. Elle vise à réajuster les réponses inappropriées face au stress.
Une méta-analyse incluant neuf essais randomisés contrôlés et portant sur 610 patients a confirmé l’efficacité de la TCC, avec une réduction des symptômes de 40 % par rapport au groupe contrôle. Dans une autre étude récente, plus de 100 patients souffrant de SII modéré à sévère réfractaire aux traitements médicaux ont suivi 13 semaines de TCC. Le score de sévérité des symptômes (IBS Symptom Severity Score) a diminué de 115,8 points pour ceux traités par TCC, contre 29,7 points dans le groupe contrôle. Quant à la qualité de vie (IBS-QOL), elle a été nettement améliorée (+ 20,1 points dans le groupe TCC contre 0,2 point pour le groupe contrôle). Avec des bénéfices qui durent plusieurs semaines.
Une étude récente a évalué chez les femmes les effets du Pilates associé à des conseils alimentaires sur le syndrome de l’intestin irritable à prédominance de constipation. Le score de sévérité des symptômes (IBS-SSS) a diminué dans le groupe Pilates ainsi que dans le groupe placebo, mais avec une réduction plus importante chez ceux pratiquant le Pilates (66,75 % contre 38,28 %). Quant à la facilité pour aller à la selle, là aussi avantage marqué pour les pratiquantes du Pilates. De même, les scores de fatigue et de dépression ont montré une amélioration plus nette dans ce groupe. Ainsi, associer les conseils alimentaires à la pratique du Pilates permet une réduction plus marquée des symptômes, en particulier chez les femmes.
Quant à la méditation en pleine conscience, après six mois de sessions quotidiennes de méditation, 76 % des patients atteints de syndrome de l’intestin irritable inclus dans une étude récente ont rapporté une diminution des symptômes, particulièrement de l’anxiété associée à la maladie. Cette pratique semble avoir un impact positif durable sur le bien-être des patients.
L’efficacité de l’acupuncture reste controversée, les résultats des études variant selon qu’elles soient menées en Asie ou en Europe. De plus, ces recherches sont souvent jugées de faible qualité selon les standards de validation scientifique occidentaux. Par conséquent, il n’est pas possible de conclure à une réelle efficacité de l’acupuncture dans le traitement du syndrome de l’intestin irritable.
De plus, l’association APSSII indique que « de nombreuses personnes atteintes du syndrome de l’intestin irritable se tournent vers des approches complémentaires comme la kinésithérapie spécialisée, l’acupuncture, l’ostéopathie, la sophrologie ou les cures thermales, et rapportent un soulagement. Toutefois, leur efficacité scientifique dans la prise en charge du SII n’a pas été démontrée à ce jour. »
Pour en savoir plus : Syndrome de l’intestin irritable : quelles souches de probiotiques sont recommandées ?
Source : Sabaté J.M. et al. Expectations of IBS patients concerning disease and healthcare providers: Results of a prospective survey among members of a French patients’ association. Clinics and Research in Hepatology and Gastroenterology 2020 ; 44 (6) : 961-967 ; C.087 F. Wuestenberghs, J.M. Sabaté, P. Jouët, et al : Effet de l’ostéopathie viscérale sur la sévérité des symptômes dans le syndrome de l’intestin irritable (IBSOMT) : une étude prospective randomisée française (21 mars 2025 ; JFHOD 2025) ; Yangjian Dong et al. The effects of mind-body exercise on anxiety and depression in older adults: a systematic review and network meta-analysis, Front Psychiatry 2024 Feb 7:15:1305295 ; Session « traitement non médicamenteux des troubles fonctionnels digestifs : du cannabis à l’endoscopie, les traitements alternatifs », JFHOD2023 ; Hypnotherapy for irritable bowel syndrome, Alimentary Pharmacology and Therapeutics, mai 2015; 41(9):844-55 ; Group Cognitive-Behavioral Therapy With Interoceptive Exposure for Drug-Refractory Irritable Bowel Syndrome, avril 2022; 117(4):668-677 ; Mindfulness-based stress reduction improves irritable bowel syndrome (IBS) symptoms via specific aspects of mindfulness, neurogastroenterology and Motility, sept 2020; 32(9):e13828
Ecrit par : Hélène Joubert - Édité par Emmanuel Ducreuzet