Trisomie 21 : une nouvelle thérapie pour améliorer les fonctions cognitives
02 septembre 2022
Un essai clinique pilote mené sur un petit nombre de patients porteurs de trisomie 21 pourrait ouvrir la voie à une thérapie qui permettrait d’améliorer les fonctions cognitives des personnes souffrant du syndrome de Down. Mais aussi celles qui sont atteintes d’autres pathologies, comme la maladie d’Alzheimer.
Les personnes porteuses de trisomie 21 – environ une naissance sur 800 – ont un chromosome en plus. Et ce chromosome surnuméraire présente une caractéristique qui expliquerait l’une des manifestations cliniques de la maladie : le déclin cognitif. Celui-ci pourrait toutefois être amélioré grâce à une thérapie testée avec succès par des scientifiques de l’Inserm (Lille) et du Centre hospitalier universitaire vaudois (Lausanne) sur un petit groupe de personnes atteintes de trisomie 21.
Les chercheurs ont procédé en plusieurs étapes, décrites dans la revue Science. L’équipe du laboratoire Lille neuroscience & cognition (Inserm/Université de Lille/CHU de Lille) est d’abord partie d’une découverte récente qui concerne la neurohormone GnRH, impliquée dans le déclenchement de la puberté et de la fertilité. On sait depuis peu qu’elle joue également un rôle dans le maintien de la fonction cognitive. Les chercheurs ont donc utilisé des souris génétiquement modifiées pour reproduire la trisomie humaine, afin d’étudier le mécanisme de régulation de la GnRH dans ce contexte.
Anomalie neuronale
Ils ont découvert que cinq brins de micro-ARN impliqués dans la production de cette hormone et présents sur le chromosome 21 étaient dérégulés. En d’autres termes, chez la souris modèle de la trisomie 21, on observe des anomalies dans les neurones secrétant la GnRH. Et celles-ci conduisent à une déficience cognitive progressive.
Est-elle irréversible ou est-il possible d’inverser la tendance ? C’est là qu’interviennent les médecins du Centre hospitalier universitaire vaudois, spécialistes du traitement de la déficience congénitale de GnRH, une maladie rare qui se manifeste par une absence de puberté spontanée chez l’adolescent. Le traitement, qui consiste à injecter la GnRH en reproduisant le rythme pulsatile naturel de la sécrétion de cette hormone, a été testé chez la souris modèle de la trisomie 21 afin de voir s’il pouvait agir sur la fonction cognitive.
Avec succès, puisqu’en seulement 15 jours de traitement similaire au protocole prévu pour l’humain, l’équipe a démontré une restauration des fonctions cognitives chez les souris. Et a décidé de passer à l’étape suivante : tester l’efficacité du traitement chez l’humain. Un essai clinique pilote a donc été mené sur sept hommes porteurs de trisomie 21, âgés de 20 à 50 ans.
6 patients sur 7
Chacun des participants a reçu une dose de GnRH toutes les deux heures en sous-cutané pendant 6 mois, à l’aide d’une pompe placée sur le bras. A l’issue de l’essai, les tests de cognition ont montré une amélioration des performances chez 6 des 7 patients : meilleure représentation tridimensionnelle, meilleure compréhension des consignes, amélioration du raisonnement, de l’attention et de la mémoire épisodique. Des changements visibles à l’IRM.
Ces résultats suggèrent que la thérapie GnRH pulsatile produit des effets sur le cerveau, en renforçant notamment la communication entre certaines régions du cortex, ce qui permet d’améliorer la fonction cognitive. Cette thérapie est donc prometteuse, et pas seulement pour les personnes atteintes de trisomie 21 : certaines pathologies neurodégénératives, dont la maladie d’Alzheimer, sont potentiellement concernées. A condition bien sûr que le traitement soit validé à plus grande échelle, et en incluant des femmes.