Un frottis pour quoi faire ?

05 mai 2011

PAP Test ou dépistage HPV? La question du dépistage du cancer du col de l’utérus fait polémique. En effet d’après un collectif d’experts français, le dépistage du cancer du col de l’utérus devrait être réalisé au moyen de tests relevant de la biologie moléculaire, les tests HPV. Ces derniers en effet, détectent la présence du virus HPV qui est responsable des cancers du col, bien avant l’apparition de toute lésion. Le test de Papanicolaou en revanche, est basé sur la cytologie cervico-utérine après frottis. Utilisé depuis des dizaines d’années, ce PAP Test ne peut détecter que la présence de lésions précancéreuses.

En clair, le PAP test avertit la femme qu’elle est porteuse d’anomalies ou de lésions localisées sur le col de l’utérus, annonciatrices d’un cancer du col et nécessitant un traitement. Le Test HPV lui, l’avertit qu’elle est porteuse d’un virus qui, 20 ou 25 ans plus tard, sera responsable d’un cancer. Alors que la Food and Drug Administration américaine (FDA) vient d’autoriser le test cobas® HPV du laboratoire Roche au Etats-Unis, le collectif en question s’insurge contre les recommandations « frileuses » à ses yeux, formulées en France par la Haute Autorité de Santé (HAS).

« Le cancer à papillomavirus est une maladie exclusivement virale. Il est donc parfaitement illogique de se contenter d’un dépistage des conséquences (de l’infection par le) virus, c’est-à-dire des anomalies déjà développées », estime le Pr Didier Riethmuller. Gynécologue et obstétricien au CHU de Besançon (Doubs), il est membre du collectif d’experts français sur le dépistage du cancer du col. Avec 12 de ses confrères, il est l’auteur d’un article publié en février sur le site Internet Impact Santé, en réaction aux dernières recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) concernant le dépistage de ce cancer.

Le dépistage du cancer du col connaît « une couverture sous-optimale, avec 51,6% des femmes en situation de sous-dépistage et 40,6 % des femmes en situation de sur-dépistage », reconnaissent les experts de la HAS dans un rapport publié en 2010. Pour le Pr Riethmuller, il y a un « manque de volonté politique. Si la HAS s’est enfin positionnée sur le dépistage organisé, elle ne prend malheureusement pas en compte l’évolution technologique. La biologie moléculaire fonctionne. Deux tests validés à grande échelle – les tests PCR GP5 ou GP6 et Hybride Capture 2 – permettent à présent de rechercher l’ADN du virus ». Bien plus efficace donc, car réellement préventif.

Optimiser le dépistage

« Avec le PAP test, il y a 15% de faux négatifs. C’est-à-dire que certaines femmes sont en réalité porteuses du virus mais n’ont pas encore développé au niveau des cellules du col, de signes observables par l’examen cytologique », explique Didier Riethmuller. A contrario, « la valeur prédictive du test HPV est excellente. Lorsqu’il est négatif, la patiente ne présente presque plus de risque de développer des lésions cancéreuses pendant 5 ans » ajoute-t-il. Résultat, son utilisation permettrait de réduire le nombre de frottis nécessaires durant la vie d’une femme. Au lieu de 14 en moyenne, il n’en faudrait plus que 9.

La HAS estime que « la mise en œuvre du test pour la détection des HPV en dépistage primaire en population générale, est actuellement prématurée ». D’après le Pr Riethmuller « de nombreuses études randomisées montrent pourtant que c’est possible et efficace. Malgré tout, la HAS n’en a pas tenu compte… »

Et le remboursement ?

Au CHU de Besançon, le test HPV est utilisé depuis le milieu des années 90. C’est également le cas dans d’autres services français. Mais il n’est remboursé que dans un cas très spécifique, « la présence d’atypie cellulaire de signification indéterminée (ASC-US) au frottis », indique la HAS. En d’autres termes, lorsque l’on détecte des anomalies non identifiées après frottis. Ces dernières peuvent même n’avoir aucun lien avec le virus. Un test HPV coûte environ 50 euros…

Or ce type de test présente un intérêt dans bien d’autres indications. S’il s’avère négatif 3 à 6 mois après conisation – l’ablation d’un fragment du col de l’utérus présentant des lésions précancéreuses -, c’est alors le signe d’une guérison. Il est d’ailleurs recommandé par le Conseil national des Gynécologues et Obstétriciens français (CNGOF) depuis 2007, dans cette indication. Et pourtant, il n’est pas remboursé pour les près de 25 000 femmes en France qui sont concernées chaque année.

Rappelons que 3 000 nouveaux cas de cancer invasif du col de l’utérus sont détectés chaque année. Ils sont à l’origine d’environ 1 000 décès tous les ans.

Pour aller plus loin, consultez :
<a href="https://destinationsante.com/IMG/pdf/synthese_recommandations_depistage_cancer_du_col_de_luterus(1).pdf” target=”_blank”>les recommandations 2010 de la HAS sur le dépistage du cancer du col de l’utérus et l’article du collectif d’experts français sur le dépistage du cancer du col.

  • Source : Interview du Pr Didier Riethmuller, gynécologue et obstétricien au CHU de Besançon, Doubs, 27 avril 2011 ; site de la HAS, consulté le 27 avril 2011 ; Roche diagnostics, 20 avril 2011 ; article du Collectif d’experts français sur le dépistage du cancer du col dans Impact Santé, n°156, février 2011 ; site internet de l’Institut Pasteur, consulté le 27 avril 2011

Aller à la barre d’outils