VIH/SIDA : banaliser le dépistage
01 décembre 2009
Entre 15 000 et 60 000 personnes, en France, sont séropositives au VIH et l’ignorent… Par ailleurs, pratiquement le tiers des nouveaux diagnostics sont effectués tardivement, longtemps après la contamination. Certains malades, même, sont pris en charge au stade de SIDA clinique, mariés, à 55 ans comme le déplorait le Pr François Raffi (Nantes) lors du 5ème congrès de l’IAS au Cap (Afrique du Sud), en juillet dernier. Comment expliquer cette ignorance ? Faut-il parler de déni ? Et surtout, comment y remédier ? Peut-être en associant différentes techniques de dépistage.
Avec 79 tests de dépistage menés chaque année pour 1 000 habitants, la France figure au second rang des pays d’Europe de l’Ouest. Ce « bon résultat » pourtant, est insuffisant. En octobre 2009, la Haute Autorité de Santé proposait ainsi plusieurs pistes pour intensifier le dépistage de l’infection. Car un diagnostic précoce permet de traiter plus tôt, et aussi de limiter la contamination.
Dépistage en population générale. Le diagnostic tardif concerne le plus souvent des malades que l’on aurait cru peu exposés à la maladie. Ce sont généralement des hommes, âgés de 30 ans ou plus, vivant en couple et qui ont des enfants. Ils ont été contaminés à l’occasion d’un rapport le plus souvent hétérosexuel. Outre ces « citoyens modèles » ( ?), le diagnostic tardif affecte la population des femmes migrantes…
« Le pilier du dispositif (de dépistage et de diagnostic) est constitué par les médecins généralistes » précise France Lert, directrice de recherche à l’INSERM. « Ces derniers sont en effet légitimes pour proposer le dépistage à leurs patients, hors de tout facteur de risque connu. » Un test d’efficacité de ce dépistage généralisé est actuellement mené à l’hôpital de Garches, en région parisienne : chaque personne arrivant aux urgences se voit systématiquement proposer un test.
Dépistage ciblé. Celui-ci doit être spécifiquement proposé aux personnes les plus exposées, sous la forme d’un dépistage régulier et répété. D’ailleurs comme le souligne France Lert, « des campagnes d’information et de sensibilisation ciblent d’ores et déjà ces populations ».
Dépistage individuel volontaire. Il doit rester accessible pour quiconque souhaite connaître son statut sérologique. Et cela, qu’il y ait eu ou non exposition à une situation de risque.
Antirétroviraux. « Le traitement de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant est un immense succès » rappelle France Lert. La prophylaxie post-exposition donne également de très bons résultats. Enfin, « il existe des arguments forts pour penser que la mise en œuvre d’un traitement avant la prise de risque peut être efficace. Des études sont en cours aux Etats-Unis, et un projet se prépare en France auprès de la population homosexuelle masculine. »
Nouvelles recommandations de l’OMS. Depuis aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande de débuter le traitement antirétroviral plus précocement. Pour les adultes et adolescents, et plus spécifiquement pour les femmes enceintes séropositives. Pour ces dernières, le traitement pourrait commencer dès la 14ème semaine, et se poursuivre jusqu’à la fin de la période d’allaitement. C’est la première fois que l’OMS recommande un traitement des mères séropositives et de leur enfant pendant l’allaitement.
LES GROUPES A RISQUE
Cinq groupes sont reconnus en France pour leur plus forte prévalence du VIH/ SIDA :
– les homosexuels de sexe masculin ont le taux de prévalence le plus élevé (près de 20% de personnes séropositives, d’après l’étude Prévagay) ;
– Les migrants originaires d’Afrique de l’Ouest, ainsi que les Français des départements d’Amérique (surtout la Guyane) ;
– Les hétérosexuels ayant eu plus d’un partenaire sexuel au cours des 12 derniers mois ;
– Les usagers de drogues injectables ;
– Les prostitués des deux sexes.
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Source : Interview de France Lert, INSERM, 25 novembre 2009 – Recommandations en santé publique de la HAS : dépistage de l’infection par le VIH en France, octobre 2009.