Vivre dans la peau d’un insuffisant cardiaque
11 octobre 2019
New Africa dans shutterstock
Se mettre dans la peau d’un patient insuffisant cardiaque pour ressentir les symptômes… Quoi de mieux pour savoir ce que vit votre proche malade ? Ou prendre conscience de votre état de santé et consulter au plus tôt si vous êtes à risque ?
Simuler le quotidien d’un patient atteint d’insuffisance cardiaque… voilà l’idée mise en œuvre à Rennes, à l’occasion des Journées francophones de l’Insuffisance Cardiaque. Le principe : déambuler pendant 5 à 10 minutes dans un appartement reconstitué, les chevilles lestées de 6 kilos. Un dispositif mis en place pour vous faire ressentir la prise de poids et les œdèmes, principaux symptômes avec la fatigue et l’essoufflement à l’effort de l’insuffisance cardiaque.
Au casque, une voix vous guide : « Saisissez la corbeille de fruits », « asseyez-vous dans le canapé », « penchez-vous »… autant de gestes du quotidien, basiques mais éprouvants pour les patients. Tous les objets sont lourds et le moindre geste coûte en énergie. En entrant dans la chambre, vos pieds s’enfoncent dans une mousse souple et vous déséquilibre. Une situation caractéristique de l’impact des œdèmes. En fin de parcours, une balance vous attend. Ainsi, votre poids s’affiche… avec 6 kg supplémentaires… Et vous n’avez qu’une hâte : ôtez les poids de vos chevilles.
Des efforts au jour le jour
Sauf que les patients, eux, ne disposent pas de ce choix. « Nous rencontrons ces obstacles chaque jour », témoignent Steven Macari, président de l’association Vie et Cœur et Jean Léonard, président de l’Association pour les patients insuffisants cardiaques (ASPIC). Tous deux souffrent d’insuffisance cardiaque et souhaitent alerter la population sur cette grave maladie évolutive dont la gravité est encore mal considérée.
Consultez au plus tôt
Dans l’insuffisance cardiaque, le cœur n’est plus capable d’assurer son rôle de pompe. L’origine ? Un infarctus du myocarde ou une pathologie cardiaque. Les principaux facteurs de risque relèvent du tabagisme, de l’hypertension, de l’obésité et du diabète.
« Pour bien traiter l’insuffisance cardiaque, il faut la traiter tôt. Les thérapeutiques fonctionnent mieux », détaille le Pr Erwan Donal, cardiologue au CHU de Rennes. Or les malades subissent des retards de prise en charge. « En moyenne, les patients diagnostiqués attendent 14 jours après l’expression d’un symptôme, signant l’aggravation de la maladie, pour être hospitalisés. Autant de jours qu’ils passeront à l’hôpital le temps que leur état se re-stabilise. »
« L’éducation thérapeutique doit être placée au cœur du suivi pour que le patient reconnaisse les symptômes alarmants. Pour que toute la population identifie l’insuffisance cardiaque », explique le Pr Patrick Jourdain, cardiologue à l’Hôpital Bicêtre (AP-HP, Paris). Il s’agit là d’une priorité de santé publique : l’insuffisance cardiaque, touche 1 million de Français et coûte la vie à 70 000 patients chaque année (contre 15 000 par infarctus du myocarde). Sans compter l’isolement social parfois pesant au quotidien.
A noter : « L’insuffisance cardiaque constitue la première cause d’hospitalisation des plus de 65 ans », détaille le Pr Erwan Donal, cardiologue au CHU de Rennes. « Et la 4ème cause de mortalité en France. »
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Source : Interviews du Pr Erwan Donal, cardiologue au CHU de Rennes – Pr Patrick Jourdain, cardiologue à l’Hôpital Bicêtre, AP-HP, Paris – Steven Macari, président de l’association Vie et Cœur, Jean Léonard, président de l’Association pour les patients insuffisants cardiaques (ASPIC) - Journées Francophones de l’Insuffisance Cardiaque, des Cardiomyopathies, de l’Assistance et de la Transplantation cardiaque – 19-20 septembre – Rennes.
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Ecrit par : Laura Bourgault – Edité par : Emmanuel Ducreuzet