Tabac : la tempête qui fait pschitt

06 juillet 2011

Un volet du projet de loi initié par le ministère de la Justice sur la « répartition des contentieux et l’allègement de certaines procédures juridictionnelles » fait grand bruit : celui qui est consacré au tabac. Voté le lundi 4 juillet dernier par l’Assemblée nationale, il a été rejeté ce mercredi en Commission mixte paritaire (CMP). Il devra donc faire l’objet d’un nouvel examen. Pour les associations anti-tabac cependant, ce projet n’a pas lieu d’être. Un avis partagé par… Xavier Bertrand, ministre en charge de la santé.

Ce débat porte sur l’Article 22 quater du projet de loi qui permettrait de « transiger sur la poursuite des infractions commises en violation de la réglementation en vigueur et relatives au fait de fumer dans un lieu à usage collectif ». En bon français, cela signifie qu’une personne en infraction pourrait recourir à la transaction pénale. Son amende pour tabagisme dans un lieu public pourrait alors être divisée par 3, passant de 135 à 45 euros.

Xavier Bertrand opposé à un assouplissement de la loi

Selon le Pr Bertrand Dautzenberg, Président de l’Office français de Prévention du Tabagisme (OFT) « ce projet de loi est une forfaiture. Il est incompréhensible en termes de santé. L’encombrement des tribunaux, qui est l’argument invoqué pour le présenter, est totalement fallacieux. Au niveau national, moins de 20 procédures relatives au tabac sont traitées par an »…

De son côté, le ministre chargé de la Santé, Xavier Bertrand, a fait savoir ce matin « qu’il n’était pas question de revenir sur le montant des amendes quand on fume dans les lieux publics. Il n’est pas question de tolérer la moindre souplesse. La CMP a rejeté le texte. Si ce dernier revenait, j’en demanderais la modification. Dans mon esprit c’est très clair, même s’il y avait cette disposition, il faut ensuite une convention pour changer les modalités. Il faut ma signature, et elle ne viendra pas ». Voilà qui est dit…

L’Etat français respecte-t-il la Convention-cadre de l’OMS ?

Au-delà de ce projet de loi, le Pr Dautzenberg dénonce « la puissance des lobbies du tabac sur un gouvernement qui, ne respecte pas l’article 5.3 de la Convention-cadre contre le Tabac de l’OMS ». Il dénonce notamment le fait que sur le site internet de l’événement culturel Monumenta, le ministère de la Culture remercie l’un de ses mécènes, le cigarettier Japan Tobacco International (JTI). Lequel détient 19% du marché des cigarettes en France.

Le tabacologue s’interroge ainsi sur la légalité d’un tel « partenariat » entre Etat (signataire de la Convention-cadre de l’OMS) et un cigarettier. L’article 5.3 de –cette convention stipule en effet que « les Parties (les Etats-membres, n.d.l.r.) doivent veiller à ce que leurs politiques ne soient pas influencées par les intérêts commerciaux et autres de l’industrie du tabac, conformément à la législation nationale ». Y aurait-il un loupé dans la « veille » ?

  • Source : Interview du Pr Bertrand Dautzenberg, 6 juillet 2011- Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé, 6 juillet 2011 – Convention cadre de l’OMS.

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