Accouchement à domicile : des chiffres américains ravivent les passions… françaises
25 mai 2011
Après une baisse progressive de 1990 à 2004, le nombre d’accouchements à domicile a augmenté aux Etats-Unis entre 2004 et 2008. Cette situation inquiète le Collège américain des obstétriciens et gynécologues. Pourquoi ? Et surtout, cette situation peut-elle se comparer à celle qui prévaut dans l’Hexagone ?
« Les accouchements à domicile inquiètent aux Etats-Unis, car ils ne sont pas réalisés par des professionnels de santé » explique Marianne Benoît Truong Canh, du Conseil national de l’Ordre des Sages-femmes. « Le phénomène des ‘MANA’ (les Midwives Alliance of North America) gagne du terrain. Ces femmes accompagnent l’accouchement à domicile, mais sans avoir reçu la formation nécessaire. Tout au plus ont-elles accouché, elles-mêmes, à la maison ! Un phénomène comparable à celui des Doulas » en France.
De ce côté-ci de l’Atlantique
Cette tendance à la « démédicalisation » de l’accouchement inquiète également le Conseil national de l’Ordre des Sages-femmes. « C’est un problème de santé publique » souligne ce dernier. Les accouchements à domicile sont difficiles à quantifier. Le phénomène ne révèle toute son ampleur que lorsque survient un drame. « Il est en effet impossible de comptabiliser le nombre de ces accouchements en France » poursuit Marianne Benoît Truong Canh. « En 2008 cependant, le Conseil de l’Ordre a enquêté auprès de la totalité des sages-femmes libérales françaises. Résultat : seules 4,4% d’entre elles ont déclaré avoir participé à des accouchements à domicile. Ce qui représente seulement 72 professionnelles. En 2007, elles en ont pratiqué 1 169, puis 1 052 en 2008. A noter qu’en 2007, près de 4 000 demandes d’accouchement à domicile n’ont pu être satisfaites. Il y en avait eu 4 500 en 2008. »
Pourquoi un tel phénomène ?
Selon notre spécialiste, la première raison est simple : « Entre 1990 et 2005, plus de 50% des maternités ont fermé en France. A côté de cela, le manque de personnel déshumanise en quelque sorte l’accouchement. En Suède par exemple, les professionnels sont plus nombreux. Les sages-femmes sont donc davantage présentes et l’accouchement s’avère moins médicalisé ». Par ailleurs, « il n’est pas rare qu’au Conseil de l’Ordre, nous recevions des lettres de femmes, prêtes à accoucher chez elles. Elles connaissent les risques mais n’ont pas trouvé de place en maternité. Enfin certaines ne veulent pas que leur accouchement leur échappe… »
Quelles solutions pour la France ?
L’accouchement à domicile doit se faire dans « un réseau de soins et avec un encadrement plus strict ». Cet accouchement doit relever d’un projet dès le début de la grossesse. « Ce n’est pas une décision qui se prend à la légère » et il est indispensable de trouver une sage femme diplômée. Or cela devient difficile, « dans le sens où aucune assurance ne prendra en charge cette professionnelle. Elle doit donc accepter de ne pas être assurée. Elle devra enfin, être formée aux modalités de l’accouchement à domicile. ».
Dans ces conditions, « les maisons de naissance où les femmes pourraient accoucher dans un univers moins médicalisé mais avec un bon encadrement professionnel, seraient LA solution » explique Marianne Benoît Truong Canh. « Il est surréaliste de constater que dans le reste de l’Europe elles se sont généralisées, alors que dans l’Hexagone, le corps médical et même le Sénat continuent d’y faire barrage. Au Royaume-Uni, le phénomène explose. »