Amiante : reconnaître enfin les cancers professionnels du larynx et des ovaires
19 septembre 2022
L’amiante induit des cancers du poumon et de la plèvre. Personne ne remet plus ce lien en question. En revanche, d’autres cancers pourtant reconnus comme conséquence d’une exposition professionnelle à ce matériau continuent d’être sous-déclarés et sous-reconnus. C’est pourquoi l’Anses recommande l’établissement d’un tableau dédié.
L’effet cancérogène de l’amiante est connu depuis les années 1970. Mais il concerne exclusivement les cancers du poumon et de la plèvre. Aujourd’hui encore, seules ces tumeurs y sont associées dans l’esprit du public. Or depuis 2012, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) considère que le lien causal entre les cancers du larynx et des ovaires et l’exposition à ce matériau est avéré. Malgré cela, « d’après les données fournies par la Caisse nationale d’assurance maladie, seules 130 demandes de reconnaissance du cancer du larynx en maladie professionnelle associée à l’exposition à l’amiante ont été examinées entre 2010 et 2020 », indique l’Anses. Et « durant cette même période, six demandes de reconnaissance de cancers des ovaires ont été déposées ».
Et pour cause, « malgré sa reconnaissance par le CIRC depuis dix ans, le lien entre les cancers du larynx et des ovaires et l’exposition à l’amiante (reste) très peu connu », indique Alexandra Papadopoulos, chargée de projet dans l’unité Évaluation des risques liés à l’air à l’Anses. Y compris parmi les professionnels de santé. « Ni les médecins ni les malades ne font le lien avec d’autres cancers », précise-t-elle.
La solution du tableau de maladies professionnelles
Résultat, de nombreux malades ne bénéficient pas de l’indemnisation à laquelle ils pourraient aspirer, à moins « d’apporter la preuve du lien entre le cancer et son travail ». Une épreuve supplémentaire à laquelle ces patients ne devraient pas être confrontés.
Selon l’Anses, « la création d’un tableau de maladie professionnelle faciliterait la reconnaissance de ces cancers, et donc l’indemnisation des malades, en permettant de reconnaître automatiquement le lien avec une exposition professionnelle à partir du moment où le demandeur remplit les conditions définies par le tableau ».
Qui est concerné ?
Ce tableau aiderait de nombreux malades. En effet, l’amiante ayant été utilisée de façon massive pendant plus de 130 ans en France, de nombreux secteurs d’activité ont été ou sont encore concernés par une exposition professionnelle. Depuis son interdiction en 1997, le secteur du BTP est le secteur exposant le plus de travailleurs. Mais il ne faut pas négliger ceux de l’élimination de déchets, du transport ainsi que le secteur agricole.
Enfin, « de nombreuses activités professionnelles sont (encore, ndlr) effectuées dans un environnement contaminé par l’amiante, par exemple dans les secteurs de l’administration, de l’enseignement ou de la santé ». Or les femmes y sont largement sur-représentées. Mais « étant peu nombreuses dans le BTP, les études épidémiologiques sont de fait principalement réalisées chez les hommes », souligne l’Anses. « Le groupe d’experts estime qu’il faudrait plus de données pour documenter l’exposition des femmes à l’amiante et les impacts sur leur santé », plaide Alexandra Papadopoulos.