Cellules souches : un 1er essai concluant contre l’insuffisance cardiaque
19 janvier 2015
Les cellules souches servent à la régénération de multiples tissus lésés de l’organisme… comme le cœur. ©Phovoir
En octobre 2014, une patiente souffrant d’insuffisance cardiaque sévère a reçu une greffe de cellules cardiaques dérivées de cellules souches embryonnaires. Aujourd’hui, la patiente va bien. Une première en France et dans le monde. Pour autant, l’équipe médicale de l’Hôpital européen Georges Pompidou (AP-HP, Paris) à l’origine de cet essai innovant reste prudente. Les précisions du Pr Philippe Menasché, chirurgien cardiaque à la tête de l’intervention.
La patiente âgée de 68 ans a donc pu bénéficier – le 21 octobre dernier – d’un pontage coronarien. Intervention chirurgicale au cours de laquelle le Pr Menasché et son équipe ont appliqué un patch sur la partie lésée du muscle cardiaque. Et pas n’importe lequel…
Ce patch contient en effet un gel imprégné de cellules souches embryonnaires. Transformées en cellules cardiaques, elles ont le pouvoir de remplacer les cellules du cœur, et donc de régénérer le tissu malade. « Cette technique avait déjà fait ses preuves lors de la greffe de cellules rétiniennes dans la prise en charge de pathologies de l’œil. Mais c’est la première fois que ce type d’essai a lieu dans le traitement de l’insuffisance cardiaque », note le Pr Philippe Menasché.
Les cellules souches… action !
Présentée le vendredi 16 janvier à l’occasion de la 25e journée européenne de la Société française de cardiologie (Paris), cette avancée donne espoir dans la médecine régénérative cardiaque. Pour preuve, l’état de santé de la patiente opérée il y a 3 mois est stable. « Son état s’est nettement amélioré, sans qu’aucune complication n’ait été observée. Elle est rentrée chez elle et a repris une activité normale », a pu confirmer l’équipe du Pr Philippe Menasché.
Mais il est encore trop tôt pour généraliser ce type de prise en charge. Il est « difficile de distinguer les bénéfices du pontage coronarien d’une part, de la pose du patch d’autre part. Et on ne peut en aucun cas confirmer que ces cellules cardiaques sont à même de régénérer du tissu cardiaque à vie chez la patiente ». Mais une chose est sûre, « les substances sécrétées par ces cellules ont une action réparatrice sur la partie lésée du cœur».
Greffer des cellules… ou un cœur
Mais alors, pourquoi greffer des cellules souches plutôt qu’un nouveau coeur ? « La greffe de cellules cardiaques et l’implant d’un nouveau cœur, artificiel ou non, interviennent dans la prise en charge d’une même pathologie – l’insuffisance cardiaque – mais à des stades de gravité complètement différents », précise le Pr Menasché. En fait, « la greffe de cellules cardiaques est incompatible dans le cas d’un patient atteint d’une insuffisance cardiaque au stade ultime. De la même façon, un patient diagnostiqué à un stade moins avancé de la maladie ne pourrait pas supporter la greffe d’un cœur artificiel ».
Et l’avenir ?
Dans les prochains mois, 4 autres patients suivis en cardiologie devraient bénéficier d’une greffe de patch. Pour sélectionner les malades inclus dans l’étude, des critères d’inclusion sont fixés. « Une insuffisance cardiaque sévère et un antécédent d’infarctus cardiaque doivent être avérés. Par ailleurs, un acte chirurgical comme un pontage coronarien doit être indiqué pour pouvoir appliquer le patch », note le Pr Menasché. En effet, il n’est « pas envisageable de pratiquer une intervention chirurgicale pour la seule pose du patch ».
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Source : Interview du Pr Philippe Menasché, chirurgien cardiaque à l’Hôpital européen Georges Pompidou (AP-HP, Paris), le 19 janvier 2015
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Ecrit par : Laura Bourgault – Edité par : Dominique Salomon