Cosmétiques : ces nouvelles allergies liées aux produits du quotidien

14 mai 2025

L’usage des cosmétiques augmente. Ces produits renferment de nombreux ingrédients, souvent à l’origine d’allergies de contact, y compris les cosmétiques étiquetés « pour peaux sensibles ». Quels sont les derniers allergènes identifiés par les allergologues ?

Comme chaque année, les allergologues français se retrouvent à Paris pour le congrès francophone d’allergologie (15 au 18 avril 2025). Parmi les sujets abordés lors de cette 20e édition : les toutes dernières allergies de contact provoquées par des produits cosmétiques du quotidien.

Les nombreuses allergies aux produits capillaires

Un cas d’inflammation de la peau (dermite de contact) a été observé après une coloration des cheveux. Les symptômes étaient sévères : eczéma bulleux du cuir chevelu, du visage et du cou, lésions des muqueuses (conjonctivite, érosions buccales) et forte fièvre. Les tests ont identifié le Basic Blue 99, un colorant présent dans le produit utilisé, comme allergène responsable. Ainsi, d’autres substances que la bien connue paraphénylène diamine et ses dérivés doivent désormais être envisagées en cas de suspicion d’allergie à une teinture capillaire, expliquent le Dr Camille Leleu (dermatologie et vénéréologie, CHRU de Dijon) et ses confrères.

De plus, les produits de décoloration, comme les persulfates d’ammonium, peuvent provoquer une hypopigmentation localisée sur les zones de contact, notamment à la lisière du cuir chevelu (effet toxique direct sur les mélanocytes).

En 2024, un homme a présenté une éruption rouge, qui démangeait et pelait au niveau du visage et du cou, après avoir utilisé un soin après-rasage. Les tests ont confirmé une allergie à ce produit, en particulier à la Coco Betaine, un ingrédient nettoyant (tensioactif) dérivé de l’huile de coco.

Attention aux filtres solaires !

Deux cas récents d’allergie de contact à un filtre solaire de nouvelle génération, le bis-éthylhexyloxyphénol-méthoxyphényl-triazine, plus simplement appelé Tinosorb S, ont été rapportés. Ce filtre chimique protège à la fois des UVA et des UVB.

Il faut aussi prendre en compte l’aluminium, souvent présent dans les crèmes solaires minérales destinées aux enfants pour améliorer la texture, préviennent les experts. Des réactions allergiques peuvent survenir chez certains enfants déjà sensibilisés par les vaccins administrés pendant la petite enfance, notamment en cas de granulomes post-vaccinaux (petite boule sous la peau au point d’injection, parfois rouge, douloureuse ou qui démange)

Allergies aux baumes à lèvres, dentifrice et bains de bouche, savoir les repérer

L’allergie à la cire d’abeille (Cera Alba) doit être envisagée en cas de chéilite, une inflammation chronique des lèvres pouvant se manifester par des rougeurs, des fissures ou des croûtes. Cette substance, largement utilisée dans les baumes à lèvres et autres cosmétiques, est un allergène à part entière. Il ne faut pas la confondre avec la Propolis, une autre substance issue de la ruche, produite par les abeilles à partir des résines végétales pour protéger leur habitat. Bien que la Propolis soit un allergène bien connu, certaines personnes réagissent spécifiquement à la cire d’abeille sans présenter de réaction à la Propolis. D’où la nécessité de tester séparément ces deux substances lors d’un bilan allergologique.

Présenter une allergie en se brossant les dents ou en se rinçant la bouche est aussi possible. Ce fut le cas d’une fillette, qui a présenté une dyspnée (difficulté à respirer) et un prurit nasal (démangeaisons) chaque fois qu’elle se brossait les dents. Il s’agissait d’une réaction allergique immédiate aux parfums contenus dans son dentifrice, le limonène et l’anéthole, des composés aromatiques souvent utilisés pour parfumer les produits.

Autre cas de figure, celui d’une jeune femme qui avait des problèmes buccaux chroniques avec des plaies récurrentes (lésions aphtoïdes) dans la bouche depuis plusieurs mois. Cela était dû à une allergie à l’étain, un composant de son dentifrice. L’étain est ajouté aux dentifrices pour empêcher la formation de la plaque dentaire en agissant sur les bactéries (changer pour ceux contenant du fluorure de sodium).

Une femme a eu des gonflements (angiœdèmes) sur ses lèvres après avoir utilisé un bain de bouche contenant de la méthyl-isothiazolinone, un conservateur qui peut provoquer des allergies. Les isothiazolinones peuvent encore être présentes dans des produits rincés, comme les bains de bouche. En 2016, l’Union européenne a restreint leur usage dans les produits cosmétiques sans rinçage (comme les crèmes, les shampoings ou les déodorants) à des concentrations très faibles, car ils peuvent provoquer des réactions allergiques sévères (eczémas de contact). Cependant, dans les produits à rincer, leur utilisation reste autorisée dans des limites de concentration plus élevées.

Allergie aux crèmes émollientes et cicatrisantes, se poser la question

Les crèmes émollientes et/ou cicatrisantes peuvent parfois causer des eczémas de contact. Il faut se poser des questions lorsqu’une maladie de peau ne s’améliore pas malgré l’utilisation d’un produit a priori adapté. Certains allergènes récemment identifiés sont la chlorphénésine (un agent antimicrobien), la capryloyl glycine (un agent conservateur dérivé des acides aminés) et les copolymères PEG 22 et 45, utilisés pour leurs propriétés émulsifiantes, notamment dans les crèmes.

Allergie aux cosmétiques anti-âge, là aussi se cachent des allergènes !

Les dérivés des vitamines sont de plus en plus souvent impliqués dans les allergies de contact aux crèmes anti-âge. Une étude a rapporté une série de 7 femmes sensibilisées à l’acide ascorbique (vitamine C). Une femme est devenue allergique au phytonadione époxide (un dérivé de la vitamine K) et au bisabolol, un ingrédient anti-inflammatoire issu des astéracées (grande famille de plantes comprenant la camomille, l’arnica, le tournesol…). Un cas d’allergie à la phorétine, un antioxydant présent principalement dans la pomme, a aussi été rapporté.

Des produits pas si « neutres »

Une allergie de contact doit toujours être suspectée si une maladie de peau s’aggrave malgré l’utilisation d’un produit cosmétique dit « hypoallergénique ». En effet, le pentylène glycol est utilisé dans les cosmétiques pour ses propriétés antibactériennes et est considéré comme une alternative moins irritante et moins allergène que le propylène glycol. Il est donc souvent présent dans les produits « hypoallergéniques » et doit être recherché en cas d’allergie de contact.

Autre exemple, celui d’une allergie au ricinoléate de zinc (un dérivé de l’huile de ricin), contenu dans un déodorant dit « naturel », où il était utilisé pour absorber les odeurs.

Enfin, les sulfites sont utilisés dans les cosmétiques et les produits pharmaceutiques appliqués sur la peau (topiques) pour leurs propriétés antioxydantes et comme conservateurs. Ils doivent être recherchés en cas d’eczéma de contact. Par exemple, les spécialistes rapportent le cas d’une personne ayant présenté un eczéma du visage et du cou, lié au sodium métabisulfite contenu dans sa crème hydratante pour le visage pourtant décrite sur l’emballage « pour peaux sensibles », et qui s’est aggravé ensuite à cause de la prescription de kétoconazole (traitement antifongique), qui en contient également.

  • Source : Communication CFA 2025 – 20e Congrès francophone d’allergologie : Quoi de neuf en allergie de contact aux cosmétiques de la vie quotidienne ? C. Leleu, L. Collin, E. Collet ; Site de l’INRS Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES (consulté le 14/04/25).

  • Ecrit par : Hélène Joubert ; Édité par Emmanuel Ducreuzet

Destination Santé
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