Covid-19 : isoler les gènes de la vulnérabilité grâce à l’IA
23 décembre 2021
ADAM9, voici le nom du gène impliqué dans les complications des cas de Covid-19. Une découverte réalisée par des chercheurs de l’Inserm auprès de patients sans comorbidité atteints d’une forme grave de la maladie.
Les principaux motifs de complications de la Covid-19 reposent sur des facteurs de risque comme l’âge, les pathologies cardiovasculaires ou la présence d’un diabète. Mais comment expliquer les formes sévères de la maladie chez les patients de moins de 50 ans et ne souffrant d’aucune pathologie avant de contracter le SARS-CoV-2 ?
Des chercheurs de l’Inserm et de l’Université de Strasbourg ont enquêté sur la piste génétique pour répondre à cette question. Comment ? En analysant les dossiers médicaux de 72 patients, répartis en deux groupes : « l’un constitué de patients en réanimation atteints d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë et l’autre de patients hospitalisés en secteur dit conventionnel, atteints d’une forme moins grave de Covid-19 », détaillent les scientifiques. Un groupe contrôle a été formé à partir de 22 individus en bonne état de santé.
Point d’importance : la forte restriction des critères d’inclusion. « Nous avons fait le choix de nous pencher sur une cohorte de patients restreinte mais très bien définie, en excluant les facteurs confondants comme l’âge ou certaines pathologies, afin de pouvoir vraiment étudier les mécanismes moléculaires et génétiques directement associés aux formes graves, qui soient exclusivement liés à l’infection virale et non à d’autres facteurs de risque préexistants », précise le Pr Seiamak Bahram, l’un des auteurs de l’étude
600 gènes, 5 puis 1
Seconde étape : le repérage des gènes communs aux patients présentant des complications de la Covid-19, en utilisant les pouvoirs de l’intelligence artificielle***. Grâce à la reconnaissance algorithmique, une machine a permis d’isoler « 600 gènes impliqués dans l’évolution vers les formes critiques de Covid-19 ». L’identification plus fine a permis de n’en retenir que 5… puis 1, baptisé ADAM9.
In vitro, les scientifiques ont ensuite observé l’effet de l’inhibition du gène ADAM9, entraînant « une réduction des quantités de virus SARS-CoV-2 dans ces cellules, ainsi qu’à une diminution de la réplication du virus, confirmant donc son importance dans la maladie critique mais aussi son potentiel en tant que cible thérapeutique ».
D’autres travaux seront nécessaires pour confirmer ce point sur un plus large échantillon. Mais d’ores et déjà, le gène ADAM9 est sur le banc d’essai dans d’autres aires thérapeutiques : « des essais cliniques en oncologie sont en effet en cours pour tester des anticorps monoclonaux qui inhibent justement ADAM9. Des stratégies de repositionnement thérapeutique pourraient donc être envisagées à plus long terme. »
*unité U1109 « Immunologie et Rhumatologie Moléculaire »
** PU-PH, directeur de l’Unité 1109 de l’Inserm, responsable de l’Institut Thématique Interdisciplinaire de Médecine de Précision de Strasbourg et chef de service d’immunologie biologique aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg
***Partenariat avec des chercheurs de l’entreprise Genuity Science (Boston, États-Unis), et de l’Université de Californie du Sud (Los Angeles, États-Unis)
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Source : Inserm, Science Translational Medicine, le 4 novembre 2021
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Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet