Covid-19 : la délicate gestion du deuil

30 mars 2020

En cette période d’épidémie, la mort se fait plus présente et les services funéraires s’en trouvent bouleversés. Entre les interdictions de voir le défunt ou de l’accompagner une dernière fois, comment gérer son deuil ? Réponse du Pr Anne Sauvaget, psychiatre au CHU de Nantes.

La perte d’un proche s’accompagne d’un processus naturel qu’est le deuil. « Ce dernier se déroule en 3 étapes », nous explique le Pr Anne Sauvaget. « Il débute par une phase de choc, une sidération affective, une incrédulité. Puis vient le temps de l’état émotionnel douloureux. La tristesse, les pleurs, la culpabilité, et même un sentiment de colère vis-à-vis du mort prennent le dessus. Enfin, la troisième étape, celle de la réorganisation, du retour à la vie réelle. On réintègre alors les souvenirs du proche, les moments heureux. On recommence à avancer. »

Comment rendre le dernier hommage ?

Le confinement impose de limiter nos déplacements. Et cela vaut aussi pour les sépultures. Les mesures actuelles imposent un nombre limité de personnes lors du dernier hommage. Dans ces conditions, difficile de faire son deuil sans aller aux obsèques ni voir le corps. « Voir le corps participe en effet à la mise en place du processus naturel », continue Anne Sauvaget. « Cela nous place en face de la réalité. Cette reconnaissance est très importante. Ne pas voir le défunt peut entretenir – comme lors de crash d’avion par exemple – certaines lueurs d’espoir, que l’on s’est trompé de corps par exemple… ». Retardant plus encore les étapes normales.

Pour surmonter ces difficultés, « il va falloir trouver un substitut, figurer l’absence du corps », insiste la psychiatre. « Cela passe par une photo, ou un objet personnel. Puis lorsque les temps seront plus cléments, organiser une cérémonie religieuse ou laïque d’hommage. Ce rituel est très important. »

« Heureusement », rassure le Pr Sauvaget, « malgré la situation actuelle, tous les deuils ne seront pas pathologiques.». Et si vous éprouvez des difficultés à surmonter cette épreuve, certains centres hospitaliers ont mis en place des cellules d’écoute et d’orientation.

A noter : Le deuil ne devrait pas durer plus d’un an. Le danger serait de tomber dans un état dépressif. Il ne faut donc surtout pas hésiter à en parler. A un proche, à votre médecin traitant, à un psychologue ou un psychiatre.

  • Source : Interview du Pr Anne Sauvaget, 26 mars 2020

  • Ecrit par : Vincent Roche – Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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