Covid-19 : un anticancéreux contre les formes sévères
16 février 2021
Chez les patients atteints d’une forme grave de la Covid-19, un traitement contre le cancer réduirait le recours à l’oxygène, le risque de décès et participerait au rétablissement des malades.
La recherche sur les vaccins contre la Covid-19 avance à vitesse grand V. Mais côté thérapie, les chercheurs ne manquent pas non plus d’idées. Récemment, des scientifiques chinois, italiens et suédois ont testé l’efficacité du bevacizumab, un anticancéreux couramment utilisé à l’échelle mondiale contre plusieurs tumeurs depuis 2004.
L’équipe du Pr Yihai Cao* a suivi 26 patients entre février et avril 2020. Tous avaient été contaminés par le SARS-CoV-2 et souffraient d’une forme sévère de la maladie, caractérisée par des troubles respiratoires, une faible oxygénation du sang et de pneumonie. Un groupe contrôle de 26 patients dans le même état de santé a été formé.
Moins d’oxygène, moins d’hospitalisation, moins de décès
Le premier groupe a bénéficié des soins classiques ainsi qu’une dose de bevacizumab (7,5 mg/kg). Le groupe contrôle a reçu les traitements de référence mais pas d’anticancéreux. Résultat, dans le premier groupe « l’oxygénation du sang s’est améliorée dans les 24 heures suivant le traitement », par rapport au groupe contrôle. A la fin des 28 jours de suivi, 92% des patients du groupe bevacizumab avaient de moins en moins besoin d’oxygène, contre 62% dans le groupe contrôle. Au total, les patients du groupe bevacizumab ont passé 9 jours** sous oxygène, 20 pour les patients du groupe contrôle.
Aucun décès n’a été rapporté dans le groupe bevacizumab, et 65% des patients ont pu sortir de l’hôpital 28 jours après le début du traitement. Dans le groupe contrôle, 3 décès ont été enregistrés et 46% des malades ont pu rentrer chez eux sous 28 jours.
Autre donnée, le bevacizumab a également permis de diminuer les épisodes de fièvre et d’abaisser la protéine C-réactive, hautement impliquée dans le processus inflammatoire pouvant mener les patients à la détresse respiratoire voire au décès.
Comment fonctionne le bevacizumab ? En ralentissant, au niveau de la tumeur, la formation de nouveaux vaisseaux sanguins par un inhibiteur de croissance, le VEGF. Et il se trouve que les patients atteints d’une forme sévère de la Covid-19 présentent un taux élevé de VEGF, avec sur le plan physiologique une désorganisation des vaisseaux sanguins dans les poumons.
« Nous devons maintenant tester l’efficacité de cet anticancéreux auprès d’un plus large échantillon de patients », conclut le Pr Cao. « L’objectif à terme serait de pouvoir remplacer une part de la supplémentation en oxygène par le bevacizumab ». Une médication beaucoup plus simple à mettre en place.
*Karolinska Institutet
**valeur médiane
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Source : Nature Communications, le 5 février 2021
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Ecrit par : Laura Bourgault – Édité par : Emmanuel Ducreuzet