Dans le cerveau des champions : la concentration fait toute la différence
29 juillet 2024
Ce qui distingue les athlètes de très haut niveau ? Ils possèdent un « super pouvoir » qui porte un nom : la concentration. Comme le rappelle le neurobiologiste Jean-Philippe Lachaux dans son livre « Le cerveau des champions », être un champion, c’est posséder le super-pouvoir de maîtriser son attention et sa concentration. Vous allez comprendre.
La concentration, c’est le pouvoir de savoir utiliser au mieux ses super-pouvoirs, que ce soit dans le sport, le travail ou d’autres activités. Jean-Philippe Lachaux, spécialiste des mécanismes neurobiologiques de l’attention et de la concentration et directeur de recherche en neurosciences cognitives au Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon (CRNL), en a fait son domaine d’expertise. Il cite Marion Bartoli, tenniswoman, qui disait : « le premier des talents, c’est la volonté profonde de réussir. Le deuxième ressort est la capacité de concentration ». En deux mots : être un champion c’est maîtriser son attention et sa concentration.
La sélectivité de l’attention
À chaque instant, il y a toujours quelque chose que l’on perçoit de façon privilégiée : une perception que l’on met en avant. Jean-Philippe Lachaux cite à ce propos le skateboarder Joris Brichet, qui expliquait : « tu fais abstraction de tout le reste pour pouvoir être uniquement focalisé sur toutes les perceptions de tes pieds, de ton oreille interne… Il y a un sens qui disparaît quasiment complètement : c’est l’audition ».
Dans son livre, le chercheur explique ainsi la sélectivité de l’attention : même si l’on ne s’en rend pas compte, on ne perçoit à chaque moment qu’une infime partie de ce que l’on pourrait apercevoir, le reste nous étant caché. C’est un peu comme si l’on explorait une grotte avec une petite bougie dans la main. Faire attention, c’est choisir, et choisir, c’est renoncer : on ne peut pas tout percevoir en même temps. Cette sélectivité a un double intérêt : elle aide à percevoir ce qui est important, tout en gommant ce qui ne sert à rien, simplifiant ainsi la tâche de notre cerveau, qui n’est alors pas obligé de tout analyser en détail.
Concentration = perception + intention + manière d’agir
Mais l’attention (P pour perception) ne suffit pas ! On agit aussi (I pour intention). À chaque moment, on privilégie toujours une manière d’agir parmi d’autres, explique le neuroscientifique. Allons encore plus loin : si l’on agit, c’est parce que l’on a une intention en tête. Agir sans intention, cela ne fonctionne pas. En résumé, à n’importe quel moment, il est toujours possible d’identifier une perception, une intention et une manière d’agir que l’on privilégie à cet instant précis.
Là où le scientifique veut nous amener, c’est que se concentrer, c’est justement privilégier trois choses : une perception, une intention et une manière d’agir, ou « PIM ». L’objectif est de se concentrer pour stabiliser son PIM tout le temps nécessaire afin qu’il ne soit pas détruit par le premier élément de distraction (distracteur) venu.
Par ailleurs, tout comme on utilise une technique différente pour frapper un coup droit ou un revers, on ne se concentre pas de la même façon pour lire ou pour lancer une fléchette : chaque action a son mode d’emploi et donc son PIM !
Que se passe-t-il dans le cerveau ?
Chaque PIM correspond à une petite transformation temporaire du cerveau, augmentant la sensibilité de certains neurones chargés de percevoir ce dont on a besoin pour y prêter attention. D’autres neurones voient leur réactivité augmentée, ce qui permet de réagir de manière appropriée tout en maintenant une intention particulière en mémoire.
Comme il est impossible de réussir deux tâches exigeant de la concentration simultanément (le cerveau ne peut pas se spécialiser de deux façons différentes en même temps) il faut en automatiser certaines. On y parvient en répétant certaines actions, ce qui permet de les exécuter tout en se concentrant sur autre chose. Acquérir de bons automatismes est essentiel. On gagne ainsi en justesse, en rapidité et en fatigue. Et ceci vaut pour tous les domaines, intellectuels ou sportifs.
Le champion sait travailler ses PIMS
Travailler sur les PIMs, c’est s’intéresser à ce qui se passe dans sa tête ainsi que dans son corps. Travailler les PIMs amène à se concentrer sur ses actions, à chercher ce qui fonctionne bien, à repérer ce qui marche moins bien et les erreurs à corriger. Cela permet de comprendre facilement la cause de ces erreurs. En fait, le PIM constitue un mode d’emploi pour se concentrer sur ce que l’on fait.
C’est à chacun de rechercher des PIM toujours plus efficaces pour améliorer sa concentration. Dans le sport notamment, la technique gestuelle et la concentration vont de pair ; il est impensable pour un bon entraîneur de négliger l’un des deux.