Dépression : peut-on la diagnostiquer à distance ?
10 novembre 2022
Vladimir Poutine, Emmanuel Macron, Donald Trump et bien d’autres personnalités publiques font l’objet d’analyses permanentes. Sont-ils en bonne santé ? Présentent-elles un trouble de la personnalité ? Dernièrement, c’est la santé mentale du président français qui a fait l’objet de l’intérêt de plusieurs médias. Souffrirait-il d’une dépression ? En réalité, c’est impossible à savoir.
Un psychologue ou un psychiatre, même expérimenté, est-il capable de poser un diagnostic de dépression sur un patient sans le voir en consultation et lui parler en direct ? Bien que certains s’y aventurent, la réponse est « non », explique Vincent Joly, psychologue à Paris. Mais pourquoi donc ? Quatre raisons se superposent quand il s’agit de personnalités publiques.
L’aspect éthique. Tout d’abord, ces analyses dites « sauvages » ne devraient pas exister puisqu’ « un diagnostic doit être confidentiel », rappelle Vincent Joly. Qu’il relève du secret médical pour les psychiatres ou du secret professionnel pour les psychologues. « Car son contenu est de l’ordre de l’intime. »
Le ressenti du patient. D’autre part, pour « poser un diagnostic sérieux, le thérapeute doit s’appuyer sur le ressenti du patient », poursuit-il. Impossible d’obtenir ce critère sans lui. « Il faut passer du temps, plusieurs séances, avant analyser ce qui fait souffrir la personne, et comprendre la raison qui l’amène à consulter. » En matière de dépression, « il faut savoir si la personne souffre, et elle est la seule à pouvoir le dire ».
Des personnalités en représentation. En ce qui concerne une personne médiatisée, une autre difficulté s’ajoute : se sachant observées voire scrutées, « ces personnalités sont en représentation et agissent comme tel ». Ce qui troublerait encore davantage une éventuelle analyse.
La subjectivité du thérapeute. Enfin, lorsque la personne analysée est une personnalité clivante, notamment politique, « le ressenti, l’opinion du thérapeute entre aussi en compte, empêchant toute objectivité », conclut-il.
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Source : interview de Vincent Joly, psychologue à Paris
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Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet