Diabète : les yeux hautement fragilisés

31 janvier 2017

Le diabète, qu’il soit de type 1  ou 2, peut provoquer de nombreuses complications oculaires. Ce trouble métabolique constitue d’ailleurs la principale cause de cécité chez les moins de 50 ans. Comment expliquer ce phénomène ? Quelle prévention mettre en place ? Les précisions du Pr Marie-Noëlle Delyfer, ophtalmologue spécialisée en chirurgie rétinienne au CHU de Bordeaux.

Le diabète se traduit par un taux trop élevé de sucre dans le sang. Dans les deux formes (type 1 et type 2), cette anomalie entraîne une fragilité vasculaire microscopique (petits vaisseaux comme ceux des yeux) et macroscopique (gros vaisseaux comme ceux du coeur). Naturellement, les petits vaisseaux sont plus « poreux, ils laissent davantage passer le sang », précise le Pr Marie-Noëlle Delyfer. Ce mécanisme provoque l’apparition de lésions oculaires… points de départ des troubles de la vision liés au diabète. Dans les deux formes, ces lésions peuvent dégénérer en complications intra-vitréennes, en décollements de la rétine et peuvent provoquer une cataracte. Mais deux pathologies se distinguent en fonction du type de diabète.

Diabète de type 2 : une majorité d’œdème maculaire

Dans la population atteinte d’un diabète de type 2, l’œdème maculaire constitue la première cause de malvoyance. « Du fait d’un diagnostic trop tardif, 20% des patients présentent déjà des lésions oculaires lorsqu’ils apprennent leur maladie. » L’arsenal thérapeutique comprend des injections intraoculaires d’anti-VEGF ou de corticoïdes. Autre technique, la photocoagulation au laser pour stabiliser l’évolution des lésions périphériques. Entre 2 et 4 séances par œil réalisées en consultation sont nécessaires. Dernière option, une vitrectomie (ablation chirurgicale du corps vitré de l’œil) réalisée au bloc opératoire en ambulatoire dans les cas les plus sévères.

La rétinopathie, fréquente chez les diabétiques de type 1

Dans le cas du diabète de type 1, les lésions oculaires apparaissent en moyenne dans les 5 à 10 années suivant le diagnostic. Les jeunes patients souffrent majoritairement de rétinopathies, dans leur forme primitive jusqu’à un degré d’atteinte plus avancé. « Appelée rétinopathie floride prolifique, cette dernière est particulièrement redoutée à l’entrée dans la puberté et pendant toute l’adolescence, en lien avec les changements hormonaux. » A cette période le suivi ophtalmologique est donc renforcé auprès des enfants et adolescents diabétiques. « Idem chez la femme enceinte pour les mêmes raisons de fluctuations hormonales », souligne le Pr Delyfer.

Les solutions thérapeutiques consistent alors à réguler les facteurs du diabète : le taux de glycémie, la tension artérielle et la dyslipidémie associée. Les mesures pour y parvenir ? Adopter un régime alimentaire équilibré et pratiquer une activité sportive régulière. Le laser et la vitrectomie sont également proposés dans la prise en charge de la rétinopathie.

Pensez à la prévention

Tout d’abord pensez à consulter un endocrinologue si vous constatez un ou plusieurs des symptômes associés au diabète (urine abondante, soif excessive, faim accrue, perte de poids, fatigue, manque d’intérêt et de concentration, vision trouble, sensation d’engourdissement dans les mains et les pieds). Notamment si vous présentez des facteurs de risque comme la sédentarité, le surpoids, l’obésité et/ou si vous avez des antécédents.

En cas de rétinopathie par exemple, les lésions peuvent être réversibles au début de la maladie. Or sans prise en charge précoce, il est seulement possible de « stabiliser les lésions oculaires en limitant le risque de complications ».

Tous les diabétiques bénéficient d’un examen du fond de l’œil. En l’absence de lésions, une visite de contrôle est préconisée tous les 2 ans. Si la présence de lésions est confirmée, « la fréquence des visites sera programmée en fonction du bilan ophtalmologique ». Pierre angulaire d’une bonne prévention, un régime alimentaire équilibré et la pratique du sport restent essentiels pour ralentir la progression de ce trouble métabolique.

Les diabètes de types 1 et 2 touchent respectivement 200 000 et 2,5 millions de patients en France. Et les prévisions ne sont pas bonnes : « les chiffres du diabète pourraient doubler à l’horizon 2020-2025 », tant l’obésité et la sédentarité prennent de l’ampleur. Un fléau de santé publique majeur donc, sans compter les 500 à 700 000 français qui ignorent aujourd’hui leur diabète.

  • Source : Interview du Pr Marie-Noëlle Delyfer, ophtalmologue spécialisée en chirurgie rétinienne au CHU de Bordeaux, le 17 janvier 2017

  • Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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