Cellulite : ce qui reste permis…
03 mai 2011
Le 12 avril dernier, le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé a fait le ménage parmi les pratiques supposées faire disparaître la cellulite. Certaines d’entre elles en effet, exposaient les clientes au risque de complications potentiellement graves, à types de nécroses ou d’infections… C’est donc un décret ministériel qui a interdit le recours aux (nombreuses) techniques de lyse adipocytaire à visée esthétique. De quoi s’agit-il ? Quelles sont désormais les options autorisées ? Le point avec le Pr Bernard Guillot membre de la CNEDIMTS, une des commissions de la Haute Autorité de Santé (HAS).
Qu’est ce que la cellulite ? La
cellulite correspond à une «
infiltration du tissu sous-cutané par des cellules graisseuses présentes en excès », rappelle le Pr Guillot. «
Elle provoque un épaississement du revêtement sous-cutané avec un aspect assez caractéristique type ‘peau d’orange’. Il s’agit donc à la fois d’un excès et d’une anomalie de répartition du tissu graisseux ».
Vous avez dit lipolyse adipocytaire ? Cette pratique a bien d’autres noms, qui varient souvent au gré de ceux qui les commercialisent :
lipodissolution,
morpholiposculpture,
lipoclasie… toutes ces techniques visaient à affiner la silhouette en détruisant la
cellulite ou la graisse localisée. Elles recouraient pour cela à des méthodes dites « invasives » - c’est-à-dire nécessitant une incision - faisant appel à un laser transcutané ou à l’injection d’agents chimiques. D’autres techniques dites non invasives, par ultra-sons, laser, rayonnement infrarouges ou radiofréquence étaient également proposées.
Les techniques désormais hors-la-loi sont donc particulièrement nombreuses. Dans le détail, citons par exemple – et sans être exhaustif - les injections d’agents chimiques, de solutions hypo-osmolaires, de produits lipolytiques, de mélanges mésothérapeutiques. Sans oublier la carboxythérapie, les ultra-sons, les lasers (incluant les lasers transcutanés sans aspiration), les infrarouges, la radiofréquence…
Pourquoi la lipolyse est-elle dangereuse ? Ces dernières années, le ministère chargé de la santé a recensé de nombreuses complications graves : 23 cas liés à des actes de lipolyse par injection de solutions hypo-osmolaires et plus de trente cas de complications dues à des actes de lipolyse par mésothérapie. Ces notifications «
permettent d’envisager qu’il existe de nombreux autres cas, dans un domaine où les complications résultant d’actes à visée esthétique sont rarement relayées par les plaintes des patients eux-mêmes », souligne le ministère.
Ce n’est pas tout. La Haute Autorité de Santé a également constaté des manquements évidents concernant la sécurité des interventions. «
Le problème avec ces techniques de lipolyse, en particulier les techniques invasives pour lesquelles on a reconnu un danger grave pour les patients, c’est qu’elles n’étaient pas obligatoirement pratiquées en envrionnement chirurgical », explique le Pr Bernard Guillot. «
Nous étions donc confrontés à des risques infectieux non-négligeables ».
La seconde raison de l’interdiction formulée par le gouvernement tient aux complications en elles-mêmes. «
Elles ont été à l’origine d’accidents de nécrose plus ou moins grave, de nodules et autres oedèmes ». Autant de complications étroitement liées au fait que ces interventions n’étaient pas réalisées dans un environnement technique approprié.
Et maintenant ? Comme l’a confirmé le ministère de la Santé, un décret «
plus global qui permettra de mieux encadrer les actes à visée esthétique est également en préparation ». Il précisera ce qui doit relever de la chirurgie ou de la médecine esthétique, mais aussi les conditions de l’exercice de cette dernière, et les qualifications requises pour l’exercer.
En attendant, les options offertes aux patients et patientes souhaitant se débarrasser d’un excès de cellulite ne sont pas nombreuses. Il y a bien sûr la liposuccion. Egalement appelée
lipoaspiration, cette intervention chirurgicale consiste en une aspiration de la graisse sous-cutanée. Avec quels résultats et quels risques ? Pas de réponse à ce jour. Car nous explique Bernard Guillot, «
la HAS n’ »a été consultée que sur la lyse adipocytaire sans aspiration (non-chirurgicale). Nous n’avons donc pas travaillé sur la liposuccion ».
Il concède toutefois qu’avec cette technique de liposuccion, «
nous observons certes des résultats ‘avant/après’ qui montrent un bénéfice esthétique… en sachant qu’un bénéfice esthétique est toujours difficile à apprécier ». Contrairement à la lipolyse, la liposuccion relève donc du bloc opératoire. Quant aux graisses détruites, elles sont retirées et non laissées en place, comme avec les techniques désormais hors-la-loi. «
Nous avions en effet de nombreux doutes sur le devenir de ces cellules mortes dans la peau », souligne le Pr Guillot. Avant d’ajouter : «
cela ne signifie pas que les techniques de liposuccion soient dénuées de tout risque de complications… ».
L’autre possibilité ouverte aux patients, repose sur les «
moyens très soft que sont les crèmes et autres massages dits amincissants, pour lesquels les risques sont effectivement limités. Mais pas non plus de démonstration scientifique d’efficacité », souligne-t-il.
Les nouvelles techniques qui ‘surfent’ sur le décret. En attendant le nouveau texte qui doit réglementer ces pratiques, de nombreuses sociétés s’engouffrent dans les brèches laissées ouvertes par le décret du 12 avril. C’est ainsi que la nouvelle mode n’est plus de communiquer sur la disparition des graisses mais sur la réduction du volume graisseux. A l'image des ondes de choc… les exemples ne manquent pas ! Ces techniques sont certes légales mais leur efficacité et leur fondement scientifique restent à démontrer. Bernard Guillot s’avoue un brin fataliste : «
nous n’arrêterons jamais ce type d’inflation. Le problème est que nous sommes dans un marché essentiellement commercial. Et pas du tout une démarche de santé ». Autrement dit, si vous vous interrogez sur un éventuel excès de
cellulite, commencez d’abord par en parler à votre médecin.
Pour aller plus loin :
-
Décret n° 2011-382 du 11 avril ;
-
Questions / réponses sur le décret d’interdiction des lipolyses ;
-
Techniques de lyse adipocytaire à visée esthétique (Avis de la HAS).