Ebola : des restrictions de transport inutiles

07 novembre 2014

Comment empêcher l’épidémie d’Ebola de se propager à d’autres pays ? Le premier réflexe fut pour beaucoup de pays de réduire les communications avec les Etats concernés notamment par le biais des moyens de transports aériens et terrestres. Or ces moyens ne feraient  que retarder l’arrivée du virus. Un délai supplémentaire de 2 jours en Amérique du Nord, 11 en Asie, 22 en Europe, 27 en Océanie et 30 dans le reste de l’Afrique. C’est tout ce que gagneraient les pays indemnes d’Ebola avant l’arrivée du virus sur leur sol. Une équipe française de l’INSERM a calculé ces résultats grâce à un exercice de simulation, basé sur des données réelles.

Ainsi des suppressions de vols ou la fermeture de frontières ont-elles bien été décidées au cours du mois d’août par de nombreux Etats. Des compagnies aériennes européennes ont notamment supprimé leurs vols vers la zone épidémique.

Afin d’observer l’effet de ces mesures de restriction sur la propagation de la maladie, les auteurs ont utilisé un modèle informatique de diffusion virale. Celui-ci tient compte de la distribution de la population humaine dans le monde, de la mobilité locale et internationale ainsi que des caractéristiques du virus Ebola lui-même : durée d’incubation, taux d’infection, probabilité et rapidité de l’infection aux différents stades de la maladie…

Résultats, pour les chercheurs, « ces restrictions ne servent à rien… ou presque ». Puisqu’elles ne font que retarder l’arrivée du virus, de quelques jours. De plus, « elles sont très controversées car elles ont un impact économique et logistique important », rappelle Vittoria Colizza, co-auteur de l’étude. « Elles peuvent même priver les pays endémiques de certaines ressources pour lutter contre la maladie. » C’est ce que rappelait Stéphane Mantion, président du CICR lors d’une conférence de presse à l’Académie nationale de médecine ce mardi. « Le lien aérien est essentiel, entre autres pour transporter le matériel nécessaire à la lutte contre Ebola. »

C’est d’ailleurs pourquoi l’OMS et les Nations unies plaident depuis le début de la flambée en défaveur de ces mesures. « Avec cette étude, nous avons voulu apporter des données chiffrées pour informer au mieux les décideurs », souligne Vittoria Colizza. « Si un Etat souhaite empêcher l’importation du virus, alors fermer une frontière ne servira à rien. Par contre, cette mesure peut lui laisser le temps de s’organiser pour les soins à venir », précise-t-elle. D’autres travaux montrent qu’une solution efficace est de « lutter contre la transmission du virus au niveau local, à sa source, via une hospitalisation plus rapide des nouveaux cas ou encore via l’augmentation des capacités d’accueil en centres de soins », conclut-elle.

  • Source : INSERM, 7 novembre 2014 – Académie nationale de médecine, 4 novembre 2014

  • Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Vincent Roche

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