Ebola : « une épidémie atypique car non maîtrisée »
30 septembre 2014
Le virus Ebola a tué plus de 3 000 personnes en Afrique de l’Ouest. ©CDC Atlanta/ Frederick Murphy
Totalement hors de contrôle, l’épidémie d’Ebola va s’intensifier au cours des prochaines semaines. Dans quelles proportions ? Si des études évoquent plus d’un million de cas d’ici la fin janvier 2015, il est difficile de mesurer son évolution avec précision. L’occasion de revenir sur les caractéristiques d’une épidémie.
Sur le plan théorique, une épidémie est définie « par la survenue en excès de cas, par rapport à la situation habituelle, d’une maladie donnée en un lieu et une période de temps définis », explique l’Institut de Veille sanitaire.
L’analyse de sa dynamique suit généralement le principe suivant, reproductible sur une courbe : un début, une rapide augmentation du nombre de cas, un ou des pics, une ou plusieurs vagues successives, une phase de décroissance avant de la fin de l’épidémie…
Dans le cas d’Ebola, tout a commencé en Guinée semble-t-il début 2014 où l’épidémie a couvé – sans être détectée – pendant plus de trois mois. Le 23 mars, l’OMS a publié la notification officielle d’une flambée en Guinée sur son site internet. Le 8 août, elle déclarait officiellement l’épidémie : « urgence de santé publique de portée internationale ».
Un virus endémique après avoir été épidémique ?
Au 26 septembre 2014, l’OMS avait recensé plus de 3 000 morts (3 083), parmi les 6 553 cas probables, confirmés ou suspectés qui lui ont été rapportés. « Nous ne sommes pas dans un schéma classique d’une épidémie d’Ebola puisque celle-ci a provoqué plus de cas à elle seule que l’ensemble des épidémies Ebola constatées depuis 1976 », nous explique le Pr Bruno Lina, virologue à Lyon. « Par ailleurs, nous sommes toujours en phase de croissance d’épidémie. C’est donc atypique car non maîtrisé. La raison principale tient au fait que les cas sont observés dans des zones urbaines, avec une transmission facilitée du fait de la promiscuité ».
L’OMS a également évoqué la possibilité que le virus devienne endémique. Autrement dit, qu’il survienne à l’avenir des cas de façon continue, mais sans pic de fréquence. « Normalement », poursuit le Pr Lina, « à la fin de l’épidémie, le virus entre en phase silencieuse. Dans les zones endémiques, les virus sont susceptibles de réapparaitre avec une fréquence plus élevée. Cette notion de virus endémique signifie que la faune sauvage est contaminée, et qu’un ré-ensemencement chez l’homme à partir de cette faune dans la région est probable dans le futur ».
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Source : OMS, 26 septembre 2014 – CDC Atlanta, 23 septembre 2014 – Institut de Veille sanitaire, J.-C. Desenclos et al. / Médecine et maladies infectieuses 37 (2007) 77–94 – Interview du Dr Bruno Lina, 26 septembre 2014
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Ecrit par : David Picot – Edité par : Emmanuel Ducreuzet