Essais nucléaires en Polynésie française : des risques de cancer réels… mais faibles
15 mai 2023
Entre 1966 et 1974, la France a réalisé 41 essais nucléaires en Polynésie. Des travaux ont déjà pointé du doigt un surrisque de cancer de la thyroïde chez les personnes exposées à ces essais. Des chercheurs confirment ce risque, bien que faible.
Quelles sont les conséquences des retombées radioactives des essais nucléaires en Polynésie française sur la santé des populations ? Plusieurs travaux se sont déjà penchés sur la question. Ainsi, le cancer de la thyroïde serait le risque le plus important. Et ce en raison de la quantité d’iode radioactif libérée lors des essais nucléaires et de son absorption active par la thyroïde.
En 2010, des chercheurs de l’Inserm, de l’Université Paris-Saclay au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations (CESP) à Gustave-Roussy avaient comparé l’exposition aux rayonnements des 229 Polynésiens ayant eu un diagnostic de cancer de la thyroïde entre 1981 et 2003 à celle de 373 individus « témoins ». Cette étude menée sur la population locale montrait alors une faible augmentation du risque de cancer de la thyroïde en lien avec l’augmentation de la dose reçue à la thyroïde avant l’âge de 15 ans. Mais aux dires mêmes des auteurs, ces résultats étaient insuffisants pour conclure « de façon solide sur les liens entre les retombées des essais nucléaires atmosphériques et la survenue de pathologies radio-induites ».
C’est pourquoi ils ont conduit un second travail. Grosse différence avec le précédent, ils ont eu accès aux documents originaux des rapports internes des services de radioprotection, déclassifiés par l’armée française en 2013 et relatifs aux 41 essais nucléaires atmosphériques menés par la France entre 1966 et 1974 en Polynésie française.
Une légère augmentation
Ils ont ainsi pu simuler le nuage radioactif de chaque essai nucléaire, et estimer la dose de radiation reçue par la thyroïde de 395 personnes diagnostiquées d’un cancer de la thyroïde entre 1984 et 2016. Ainsi ont-ils observé que « les essais nucléaires réalisés par la France pourraient être responsables au total de 2,3 % des cas totaux de cancer de la thyroïde ».
Pour Florent de Vathaire, chercheur Inserm à Gustave-Roussy et principal auteur de l’étude, « ces résultats (…) confirment que les essais nucléaires sont très probablement à l’origine d’une augmentation, faible, de l’incidence des cancers de la thyroïde en Polynésie française. Ils doivent toutefois être considérés avec prudence car l’estimation des doses de radiation reçues à la thyroïde il y a plus de 50 ans est nécessairement imprécise. »