Étudiants : quand l’intelligence artificielle détecte le risque suicidaire
15 juin 2021
La Covid-19 a provoqué une hausse des cas de dépression dans la population étudiante. Dans ce contexte, l’Inserm dévoile une technique d'intelligence artificielle (IA) capable de détecter les comportements suicidaires chez les jeunes.
Tristesse chronique, apathie inhabituelle, troubles du sommeil et de la confiance en soi, idées noires : tels sont les signes qui peuvent vous mettre la puce à l’oreille concernant un risque de dépression voire de pensées suicidaires chez votre grand adolescent. Mais l’humain étant imparfait, l’Inserm* a décidé de miser sur les ressources de l’intelligence artificielle (IA) pour détecter cette fragilité. Point important quand « l’on connait l’importance d’une détection et d’une prise en charge précoce de ce risque », soulignent les scientifiques.
Comment l’IA fonctionne-t-elle ?
Les chercheurs ont commencé par lister les 70 indicateurs « qui prédisent avec précision les comportements suicidaires des étudiants ». En se basant sur le principe de la machine learning method**, ils ont ensuite mis au point un algorithme capable d’associer les symptômes les plus édifiants au risque suicidaire: les pensées suicidaires, l’anxiété, les symptômes de dépression et le manque d’estime de soi. A eux seuls, ces 4 facteurs « permettent de détecter environ 80% des comportements suicidaires ».
Cette méthode de détection par l’IA a été testée sur plus de 5 000 étudiants*** entre 2013 et 2019, avec un suivi moyen individuel d’un an. Tous ont rempli deux questionnaires, au début et à la fin de leur inclusion dans l’étude. Les items portaient notamment sur la consommation de drogues, d’alcool, sur les antécédents médicaux, psychiatriques et psychiques. Bilan, « 17% des étudiants participants, filles (17,4%) comme garçons (16,8%) ont présenté des comportements suicidaires au cours de l’année qui s’est écoulée entre les deux questionnaires ».
Recherche et prévention
Ce travail a une résonance particulière dans un contexte de crise sanitaire délétère pour la santé mentale des adolescents, comme le rapportaient les auteurs du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) au mois de mai. Sans compter les fragilités inhérentes à la construction de la vie adulte (pression scolaire, psychosociale).
« Ce résultat n’aurait pas été obtenu sans l’utilisation de techniques d’intelligence artificielle, qui ont permis de croiser un grand nombre de données de façon simultanée », complète la Pr Melissa Macalli, doctorante en épidémiologie et auteure de l’étude. Cela « ouvre des nouvelles perspectives aussi bien de recherche que de prévention ».
A noter : le suicide constitue la deuxième cause de mortalité chez les 15-24 ans.
*Université de Bordeaux en partenariat avec des scientifiques québécois de l’Université de Montréal et Mc Gill
**Cette méthode d’apprentissage automatique « est une forme d’intelligence artificielle (IA) qui permet à un système d’apprendre à partir des données et non à l’aide d’une programmation explicite ».
***Inclus dans la cohorte i-Share dirigée par le Pr Christophe Tzourio, Université de Bordeaux