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« Le papillomavirus, c’est une famille de virus très répandus. Certains sont oncogènes et peuvent provoquer des cancers, chez la fille comme chez le garçon », explique le Dr Olivier Jourdain, chirurgien gynécologue-obstétricien à Bordeaux. En effet le HPV touche 8 personnes sur 10 au cours de leur vie. La plupart de ces infections guérissent spontanément mais certaines peuvent être à l’origine de cancers qui se développeront plus tard. Le cancer du col de l’utérus reste le plus connu, avec 3 100 nouveaux cas et 1 100 décès chaque année. Mais, ajoute le spécialiste, « il ne faut pas oublier les cancers ORL liés aux HPV, qui touchent plus spécifiquement les hommes (1 300 cas annuels), et les autres cancers HPV induits comme les cancers de l’anus (près de 1 400 cas), et des cancers plus rares comme ceux de la vulve ou du vagin ».
« Le dépistage du cancer du col existe depuis les années 1950. C’était, avant l’arrivée du vaccin, le seul moyen d’action, et il a permis de réduire considérablement l’incidence de la maladie », rappelle le Dr Jourdain.
En France, un programme national de dépistage organisé existe depuis 2018. Les femmes âgées de 25 à 65 ans reçoivent une invitation de l’Assurance maladie pour réaliser l’examen, pris en charge à 100 %.
L’autre pilier de la prévention repose sur la vaccination. « Le vaccin est une prévention primaire : il empêche l’infection avant qu’elle ne commence. C’est là toute sa force », insiste le médecin.
Malgré l’existence de ces moyens de prévention, leur utilisation reste inégale et insuffisante. « Seules 60 % des femmes participent au dépistage », souligne le Dr Jourdain. « Résultat : de nombreuses lésions précancéreuses sont encore découvertes tardivement, entraînant des traitements plus lourds comme la conisation. »
Concernant la vaccination, la France a longtemps été en retard en matière de couverture vaccinale. « En 2020, on plafonnait à 21 %. » Aujourd’hui, la situation s’améliore. La couverture atteint désormais 58,4 % chez les filles et 36,9 % chez les garçons. « On a relevé la tête, mais nous restons loin derrière les pays européens qui dépassent 90 %, comme l’Espagne, le Portugal ou la Suède ».
D’autant que si une fille de 15 ans sur deux (58,4 %) et un garçon sur trois (36,9 %) ont reçu une première dose, la couverture vaccinale est en réalité très inégale d’un territoire à l’autre. En métropole, Provence-Alpes-Côte-d’Azur (50,0 %), l’Île-de-France (48,8 %) et la Corse (50,9 %) sont les trois régions où la vaccination (au moins une dose) est la plus faible.
La vaccination organisée à l’école a fait ses preuves dans de nombreux pays européens pour atteindre une couverture vaccinale importante. En France, depuis 2023, la vaccination est proposée gratuitement aux élèves de 5e. « C’est un vrai levier pour réduire les inégalités d’accès : elle est gratuite et accessible à tous les enfants de 11 à 14 ans », souligne le Dr Jourdain, qui pilote plusieurs centres départementaux de vaccination scolaire en Nouvelle-Aquitaine. Le dispositif doit encore s’améliorer pour atteindre ses objectifs, mais il a eu un effet indirect très positif : « Après la campagne scolaire, 54 % des mères se sont renseignées auprès de leur médecin, et beaucoup ont choisi de vacciner leur enfant en ville. L’essentiel, c’est que les adolescents soient protégés, peu importe où. »
« Cette campagne a permis d’élargir l’accès à la vaccination. Elle permet d’améliorer la couverture vaccinale dans des zones où la démographie médicale est faible. Dans ces zones, c’est très compliqué pour les gens de se faire vacciner parce qu’ils n’ont pas de médecin traitant, parce que la pharmacie est loin, parce que la prévention est plus difficile… L’idée de fournir une offre accessible c’est un enjeu important. Et on voit que cela marche ! », explique le Dr Olivier Jourdain.
Trois grandes nouveautés vont se mettre en place au cours de la prochaine campagne de vaccination dans les collèges :
Il existe également d’autres parcours de vaccination, en dehors de l’école. La vaccination peut être prescrite et réalisée par différents professionnels de santé : médecins, pharmaciens, sages-femmes ou infirmiers2. Cette flexibilité permet aux adolescents d’être protégés même s’ils n’ont pas pu bénéficier de la campagne scolaire, et d’adapter la prévention à chaque situation.
Source : Interview du Dr Olivier Jourdain, septembre 2025
Ecrit par : Emmanuel Ducreuzet – Edité par : Vincent Roche