Un intestin humain cultivé in vitro

21 novembre 2016

Fabriquer un intestin de toutes pièces, ou presque. C’est l’exploit réussi par une équipe franco-américaine. A l’aide de cellules souches, les scientifiques ont recréé un intestin humain fonctionnel. Présentation.

Autrement qualifié de « second cerveau », l’intestin est un organe essentiel du corps humain. Il possède son propre système nerveux qui contrôle de nombreuses fonctions incluant le mélange et la propulsion du bol alimentaire au long du tube digestif, la sécrétion d’hormones, la perméabilité épithéliale. « Les perturbations de ce système sont à l’origine de nombreuses pathologies », soulignent les chercheurs du Cincinnati Children’s Hospital Medical Center et de l’INSERM*. « Son mauvais fonctionnement gène […] la contraction des muscles intestinaux. Ceci contribue à déclencher des douleurs abdominales, des diarrhées, des constipations et dans les cas graves, crée des obstructions fonctionnelles (occlusions intestinales) qui requièrent une intervention chirurgicale. »

Jusqu’à ce jour, « aucun modèle biologique [ne permettait de] l’étudier chez l’homme », notent-ils. Les chercheurs ont donc développé une approche innovante d’ingénierie tissulaire associée à l’utilisation de cellules souches pour créer un intestin humain fonctionnel.

Cultiver ensemble ou séparément ?

Avant de parvenir au résultat réussi, ils ont d’abord tenté de créer du tissu intestinal en utilisant un cocktail de molécules destinées à diriger la différentiation des cellules souches pluripotentes humaines. « Mais, avec cette seule approche, les tissus intestinaux ne possédaient pas de système nerveux entérique, indispensable à l’absorption des nutriments et à l’évacuation des déchets au travers des voies digestives », indiquent les auteurs.

Mais comment associer les cellules intestinales cultivées à celles constituant le système nerveux entérique ainsi créé ? « La difficulté de cette étape était d’identifier comment et quand incorporer les cellules de la crête neurale dans l’intestin en développement précédemment créé in vitro » explique Maxime Mahé, chargé de recherche à l’INSERM, co-premier auteur de ce travail.

La solution ? « La co-culture du tissu intestinal et des cellules précurseurs du système nerveux entérique a permis de générer un tissu humain ressemblant à l’intestin fœtal en développement », expliquent les scientifiques. « Il en a résulté la première génération de « mini-intestins » (appelés organoïdes intestinaux) complexes et fonctionnels, entièrement issus de cellules souches pluripotentes humaines. »

Implanté chez des souris dépourvues de système immunitaire, l’intestin ainsi créé a permis d’étudier une maladie intestinale rare : la maladie de Hirschsprung. Dans cette affection, le rectum et le côlon ne développent pas de système nerveux, entraînant constipation et occlusion intestinale. « Nos travaux marquent une étape essentielle dans la compréhension des maladies digestives », se réjouit Maxime Mahé. « Il s’agit encore des prémices de cette technologie mais une perspective de médecine régénérative et personnalisée est envisageable, notamment en vue de la transplantation d’un intestin spécifique à chaque patient. »

*Unité mixte de recherche 913 « Neuropathies du système nerveux entérique et pathologies digestives », Nantes

  • Source : INSERM, 21 novembre 2016

  • Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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