La musique pour ralentir le déclin cognitif
22 mai 2023
Des chercheurs de l’Université de Genève ont montré que la pratique du piano et l’écoute active de la musique ralentissaient le déclin cognitif. Spécifiquement, une augmentation de la matière grise a été constatée dans certaines régions du cerveau, impliquées dans la mémoire notamment. Explications.
La musique serait capable de ralentir le déclin cognitif lié à l’âge. C’est ce que vient de montrer une étude de l’Université de Genève (Unige), dont les résultats ont récemment été publiés dans la revue NeuroImage : Report.
On sait que, tout au long de la vie, le cerveau change. Sa forme, ses connexions évoluent en fonction de nos expériences, l’acquisition de nouvelles compétences ou même un rétablissement après un accident cérébral. Passé un certain âge, cette plasticité se réduit et le cerveau perd de sa matière grise, où sont logés les neurones. C’est ce qu’on appelle l’atrophie du cerveau. Alors, le déclin cognitif apparaît progressivement. La mémoire en particulier est l’une des fonctions les plus touchées.
De participants retraités, sans connaissance de la musique
Les chercheurs de l’UNIGE, de la Haute école de Santé de Genève (HES-SO Genève) et de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne ont étudié l’impact de la musique sur le cerveau et ses capacités cognitives. Résultats ? Pratiquer un instrument de musique ou écouter de la musique améliorerait la plasticité du cerveau et permettrait d’augmenter le volume de la matière grise. Ces travaux ont également montré que la musique boosterait la mémoire.
Sur les 132 participants, tous des retraités âgés de 62 à 78 ans, aucun n’avait suivi de cours de musique plus de six mois dans sa vie. « Nous voulions des personnes dont le cerveau ne présentait encore aucune trace de plasticité liée à l’apprentissage musical. En effet, même une brève expérience d’apprentissage au cours de sa vie peut laisser des empreintes sur le cerveau, ce qui aurait biaisé nos résultats », explique Damien Marie, directeur de l’étude, chercheur associé à la Faculté de médecine et au Centre interfacultaire des sciences affectives (CISA) de l’UNIGE.
Plus de matière grise
Divisés en deux groupes, une partie des participants a suivi des cours de piano hebdomadaires, l’autre des cours d’écoute active de musique avec un travail sur la reconnaissance des instruments et l’analyse des œuvres. Chacun devait travailler chez lui sur sa discipline, une demi-heure par jour.
« Après six mois, nous avons constaté des effets communs aux deux disciplines. La neuroimagerie a révélé, chez l’ensemble des participants, une augmentation de la matière grise dans quatre régions du cerveau impliquées dans le fonctionnement cognitif de haut niveau, notamment dans des zones du cervelet mobilisées dans la mémoire. Leurs performances ont augmenté de 6 % et ce résultat était directement corrélé à la plasticité du cervelet », indique Clara James, co-autrice de l’étude, enseignante à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’UNIGE et professeure à la HES-SO Genève.
Petits bémols
« Le volume de matière grise est resté stable dans le cortex auditif primaire droit des pianistes – une région spécialisée dans le traitement des sons – alors qu’il a diminué dans le groupe d’écoute active », précise le communiqué de presse.
Autre information : le processus global d’atrophie s’est poursuivi chez l’ensemble des participants. « Les interventions musicales ne peuvent donc pas rajeunir le cerveau mais uniquement freiner le vieillissement de certaines de ses régions », conclut Damien Marie. Il n’empêche que selon l’équipe scientifique, l’étude de la musique, facilement accessible, devrait être considérée par les pouvoirs publics comme un outil pour vieillir en bonne santé.
La prochaine étape ? Réaliser une étude sur des sujets touchés par un déclin neurocognitif léger, situé par les spécialistes entre le vieillissement normal et la démence.