Le bégaiement affecte 650 000 Français
28 novembre 2014
1% de la population française est sujet au bégaiement. ©Phovoir
En France, 5% des enfants âgés de 2 à 4 ans sont bègues. Pour un patient sur quatre, ce trouble de l’élocution persiste à l’âge adulte. Mais comment se déclenche-t-il ? Quelles solutions pour pallier les difficultés de prononciation ? Les précisions du Dr Martin Forest, orthophoniste à Montréal (Québec).
Chez le petit comme chez l’adulte, le bégaiement se traduit par des répétitions, des sons involontairement prolongés lors de la prise de parole suivis de silences avant de pouvoir réarticuler une syllabe. Dans l’échange verbal, un retard à la réponse est aussi souvent observé, comme si le cerveau mettait un certain temps à s’imprégner de ce qui est dit.
« S’il n’est pas lié à un retard mental, le bégaiement est dans la plupart des cas associé à d’autres troubles : une difficulté à se concentrer, une dyspraxie soit un blocage dans l’automatisme des gestes », décrit le Dr Forest. Pour autant, il ne s’agit pas d’un problème cognitif ou mental, lequel se traduirait par des difficultés de compréhension. Le cerveau perçoit et analyse les données normalement. En fait, la personne entend et comprend, mais bloque au niveau de la restitution logique de sa pensée à l’oral.
Les gènes et le cerveau impliqués
« Un épisode de stress ou un choc émotionnel est souvent cité comme facteur déclencheur », souligne le Dr Forest. Mais une prédisposition génétique est aussi mise en cause dans la survenue de ce trouble. En effet, un enfant né de parents bègues a 3 fois plus de risque d’en être atteint. A ce jour, quatre mutations génétiques sont ainsi associées au bégaiement.
Par ailleurs, cette altération du débit de la parole peut être repérée par IRM. Chez les sujets sains, la prise de parole fluide implique l’hémisphère gauche. Chez les personnes bègues en revanche, c’est l’aire cérébrale droite qui est sollicitée. Sur le plan hormonal, un excès de sécrétion de dopamine – molécule chargée de transmettre l’information entre les neurones – a par ailleurs été repéré chez les patients bègues.
Quelles solutions ?
En 20 ans, les neurologues ont beaucoup avancé sur la prise en charge du bégaiement. Plusieurs pistes sont ainsi envisagées pour atténuer ce trouble qui – sans être reconnu comme handicap – peut altérer les capacités de communication et impacte donc les relations sociales. Pour une prise en charge efficace :
- Consultez au plus tôt un orthophoniste ou un phoniatre si, en grandissant, votre enfant rencontre de réelles difficultés à articuler ;
- Privilégiez des activités comme le chant et la sophrologie. Relaxantes et stimulantes, ces techniques sont efficaces chez l’adulte comme chez l’enfant pour le développement de l’oralité ;
- Pensez aux technologies ! Sur internet, l’usage du logiciel Skype (téléphonie par écrans interposés) incite à prendre la parole clairement pour que la voix reste audible. Cet outil fait d’ailleurs parti d’un tout récent dispositif d’accompagnement thérapeutique présenté à l’occasion du 26e Congrès de la Fédération nationale d’orthophonie (FNO) ;
- Acceptez – si l’occasion se présente – de prendre la parole en public. « Surmonter la difficulté à articuler et la peur du jugement des autres peut se révéler bénéfique pour la confiance en soi et donc atténuer les blocages du langage », décrit le Dr Martin Forest. Preuve en est, de tout temps, philosophes, politiques et acteurs tels Aristote, Winston Churchill, Einstein ou encore Marylin Monroe – adeptes des grands discours – ont été atteints de ce trouble mais, en persévérant face à leur public, ont pu mener à bien leur carrière.
Pour en savoir plus, des informations sont disponibles sur le site de l’Association Parole Bégaiement.
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Source : Interview du Dr Martin Forest, orthophoniste à Montréal (Québec), le 21 novembre 2014
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Ecrit par : Laura Bourgault – Edité par : Emmanuel Ducreuzet