Le beurre, l’argent du beurre et la margarine

29 novembre 2005

Une compagnie française d’assurance s’apprêterait à rembourser margarines et autres yaourts anti-cholestérol produits par un groupe anglo-néerlandais, numéro 1 mondial de l’agro-alimentaire et des détergents. Leur partenariat devrait être annoncé aujourd’hui.

La MAAF et Unilever donc, se lancent dans une opération commune “inédite” selon les deux sociétés… Ce type d’action existe cependant déjà aux Pays-Bas où l’assureur santé VGZ rembourse en partie la margarine Becel-Pro-Activ (produite par Unilever) ainsi que divers produits laitiers.

Ni l’assureur ni l’industriel n’ont voulu nous confirmer les modalités de cette alliance… dont rien ne laisse supposer qu’elle concernerait aussi les produits d’autres fabricants. Toujours est-il que l’objectif serait de “récompenser” (dixit la MAAF) les acheteurs qui présentent un excès de cholestérol. “Récompenser” ? Un terme qui semble peu approprié tant les bienfaits de ces produits sont discutés.

Un manque d’évaluation à long terme…
Les rédacteurs de la Revue Prescrire notamment viennent de publier un dossier complet sur la question. Ils concluent sans ambages que les margarines enrichies en phytostérols et autres yaourts contenant des phytostanols “n’ont pas leur place” en prévention cardiovasculaire. D’après plusieurs essais comparatifs “de courte durée“, ces aliments n’entraîneraient qu’une “petite baisse” -de l’ordre de 6% à 10% du LDL-cholestérol- le mauvais cholestérol. Un résultat certes honorable mais qui n’est pas supérieur à celui que permet la simple hygiène alimentaire…

Les auteurs insistent surtout sur le manque “d’évaluation clinique à long terme de la consommation régulière d’aliments enrichis en phytostérols ou en phytostanols“. Enfin, ils rappellent que ces produits sont contre-indiqués aux femmes enceintes et allaitantes ainsi qu’aux enfants de moins de 5 ans. Ces aliments ne sont donc pas une panacée. D’après les rédacteurs de Prescrire, “les patients soucieux de prévention cardiovasculaire ont davantage intérêt à suivre un régime dit ‘méditerranéen’“.

Cette initiative pourtant, suscite la gêne à double titre. D’abord parce que cette alliance entre un assureur et un fabricant n’est ni plus ni moins qu’un accord circonstanciel business to business. Pourquoi pas plusieurs assureurs, et plusieurs producteurs si ces produits valent vraiment ce qu’ils promettent ? Et puis surtout, alors même que l’Assurance-maladie fait tout pour moins prendre en charge les vrais médicaments qui baissent vraiment le cholestérol -de 40% à 50%, eux…- et la mortalité cardiovasculaire, il est pour le moins dérangeant que certains acteurs économiques organisent une vraie-fausse prise en charge d’un risque bien réel, sur des bases commerciales et non pas scientifiques ni sanitaires.

  • Source : La Revue Prescrire, tome 25, n°266

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