Le clitoris, cet obscur objet de désir

25 novembre 2013

C’est le seul organe du corps humain spécifiquement voué au plaisir. C’est aussi un objet de luttes idéologiques qui durent depuis l’Antiquité. Avez-vous deviné de quoi il est question ? Trêve de suspense. C’est du clitoris dont il s’agit ici. Dans la réédition de son ouvrage « La fabuleuse histoire du clitoris », le sexologue Jean-Claude Piquard nous livre une enquête historique et passionnante. Une vulgarisation jamais vulgaire.

« Les hommes qui disent que les femmes sont frigides sont des mauvaises langues ». La première phrase (citation de Sacha Guitry) annonce la couleur de cette fabuleuse histoire. C’est bien de plaisir féminin dont il sera question ici. Mais pas seulement. Car avant de parler de stimulation et d’orgasme, l’auteur détaille plus de 2 000 ans de connaissance de ce fameux « bouton de rose ».

Connaissez-vous par exemple l’énigme de Tirésias ? Dans la mythologie grecque, une question était de savoir qui savourait le plus les plaisirs de l’amour, l’homme ou la femme ? Tirésias, un homme à l’origine, fut changé en femme par les dieux. Ainsi éprouva-t-il les deux faces de la jouissance. Et selon lui…le plaisir féminin surpasse celui des hommes ! Mettre ainsi le passif de la femme plus haut que le viril hédonisme déplut aux dieux qui le rendirent aveugle… Une vision très masculine qui devait plonger le clitoris dans plusieurs siècles d’obscurantisme.

Dessine-moi un clitoris…

Encore aujourd’hui, chez les adolescent(e)s la fonction érogène et même l’emplacement du clitoris semble poser problème. Dès les premières pages, l’auteur a demandé à des ados de dessiner d’un côté le sexe féminin et de l’autre le sexe masculin. Si ce dernier ne connaît finalement que peu de différences selon les représentations, le sexe féminin relève lui de diverses écoles artistiques. Certains tracent une simple croix. D’autres sont tellement démunis qu’ils ont littéralement collé aux mots dans la mesure où pour figurer les lèvres, ils ont griffonné les seuls qu’ils connaissaient, à savoir celles de la bouche.

Mais l’un des grands intérêts de l’ouvrage est de ne pas se cantonner à la légèreté et autres gauloiseries. Ainsi y aborde-t-on la question de la religion, du pêché de chair à l’excision. Les 144 premières pages détaillent ainsi, siècle par siècle la – ou plutôt les – visions de l’humanité sur le clitoris, qui finalement demeure un objet d’ignorance.  Un mépris qui va de pair avec une minoration du corps et de la place des femmes, surtout aux XIXe et XXe siècles.

Heureusement, aujourd’hui les mentalités ont quelque peu changé. On n’hésite pas à parler de plaisir clitoridien. Un sujet largement développé en dernière partie, histoire de – selon l’auteur- « redécouvrir et célébrer le corps féminin, ses plaisirs et sa liberté. »

Ecrit par : Vincent Roche – Edité par : Emmanuel Ducreuzet

  • Source : La fabuleuse histoire du clitoris, Jean-Claude Piquard, éd. H&o Au féminin, réédition 2013, 188 pages, 16 euros

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