LE PROGRAMME DES MONOGRAPHIES DU CIRC CLASSE LES CONTRACEPTIFS OESTROPROGESTATIFS ET L’HORMONOTHERAPIE MENOPAUSIQUE COMME CANCEROGENES

03 août 2005

Un groupe de travail des Monographies du CIRC a récemment conclu que les contraceptifs oraux oestroprogestatifs combinés et l’hormonothérapie ménopausique oestroprogestative sont cancérogènes (Groupe 1), après un examen complet de la littérature scientifique publiée.

En même temps, le groupe de travail soulignait qu’il disposait d’indications convaincantes selon lesquelles les contraceptifs oraux ont un effet protecteur contre certains types de cancer.

Les contraceptifs oraux et l’hormonothérapie ménopausique ont des effets bénéfiques et des effets secondaires néfastes. Chaque femme qui utilise ces produits devrait en discuter les risques et bénéfices globaux avec son médecin.

Le groupe de travail, composé de 21 chercheurs venus de 8 pays différents, a été réuni par le Programme des Monographies du CIRC du Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC), l’agence de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la Santé.

Une importance majeure pour la santé publique
Ces nouvelles Monographies du CIRC (volume 91) s’intéressent aux expositions auxquelles des millions de femmes dans le monde sont confrontées chaque jour“, selon le Dr Peter Boyle, Directeur du CIRC. “Identifier et comprendre tous les effets de ces produits revêt une importance énorme pour la santé publique“.

Dans le monde, plus de 100 millions de femmes (près de 10% des femmes en âge de procréer) utilisent actuellement des contraceptifs hormonaux combinés. En outre, l’utilisation de l’hormonothérapie ménopausique est extrêmement répandue : environ 20 millions de femmes dans les pays développés au moment du pic d’utilisation vers l’an 2000.

LES CONTRACEPTIFS ORAUX ACCROISSENT LE RISQUE DE CERTAINS CANCERS ET DIMINUENT LE RISQUE D’AUTRES CANCERS

Les contraceptifs oraux augmentent le risque de cancer du sein, du col utérin et du foie…

Il existe une légère augmentation du risque de cancer du sein chez les utilisatrices actuelles et récentes de contraceptifs oraux, mais dix ans après la fin de l’utilisation, le risque semble être redevenu semblable à celui des femmes qui n’en ont jamais utilisé. Le risque de cancer du col utérin augmente avec la durée d’utilisation des contraceptifs oraux combinés. Le risque de carcinome hépatocellulaire est accru chez les utilisatrices à long terme de contraceptifs oraux combinés dans les populations ou l’infection par l’hépatite B et les maladies hépatiques chroniques, deux causes majeures de cancer du foie, enregistrent une faible prévalence.

… mais diminuent le risque de cancer de l’endomètre et de l’ovaire

Par contraste, les risques de cancer de l’endomètre et de l’ovaire sont diminués de façon homogène chez les femmes qui utilisent des contraceptifs oraux combinés. La réduction est généralement plus forte lorsque l’utilisation est plus longue, et une certaine réduction persiste au moins 15 ans après interruption de l’utilisation.

Davantage de travaux sont nécessaires pour évaluer les risques et les bénéfices

Puisque l’utilisation de contraceptifs œstroprogestatifs combinés augmente le risque de certains cancers et diminue le risque de certaines autres formes de cancers, il est possible que le résultat global net pour la santé publique soit bénéfique, mais une analyse rigoureuse est nécessaire pour le démontrer. Celle-ci devrait être menée pays par pays et prendre également en compte les effets de maladies autres que le cancer.

L’HORMONOTHERAPIE MENOPAUSIQUE COMBINEE ACCROIT LE RISQUE DE CANCER

Le risque de cancer du sein et de cancer de l’endomètre est accru

Les études épidémiologiques montrent de façon concordante l’accroissement du risque de cancer du sein chez les femmes utilisant une hormonothérapie ménopausique. Essentiellement limité aux utilisatrices actuelles ou récentes, ce risque augmente avec la durée d’utilisation et est supérieur à celui que courent les femmes utilisant une hormonothérapie ménopausique basée sur les œstrogènes seuls. Le risque de cancer de l’endomètre dépend du nombre de jours ou des progestatifs sont inclus à la thérapie combinée. Lorsque les progestatifs sont pris moins de 10 jours par mois, le risque de cancer de l’endomètre est accru, mais lorsqu’ils sont pris tous les jours, le risque est semblable à celui des femmes qui n’ont jamais utilisé de thérapie hormonale. Le groupe ne disposait pas d’indications suffisantes leur permettant de conclure que l’hormonothérapie ménopausique avait un effet protecteur pour une localisation particulière de cancer.

Les risques et les bénéfices globaux doivent être soigneusement pesés

Des effets bénéfiques et des effets secondaires néfastes autres que le cancer ont été établis pour l’hormonothérapie ménopausique combinée œstroprogestative. Comme pour les contraceptifs oraux, une analyse rigoureuse des risques par rapport aux bénéfices serait utile pour mettre ces différents effets en perspective et évaluer les conséquences globales en termes de santé publique.

QU’EST-CE QUI EST NOUVEAU, ET COMMENT CELA SE TRADUIT-IL POUR MOI ?

Les contraceptifs oraux concernent davantage de localisations de cancer

Jusqu’a présent, il avait été déterminé que les contraceptifs oraux combinés étaient cancérogènes, mais seul le cancer primitif du foie était spécifiquement impliqué. Le groupe de travail a conclu que les contraceptifs oraux combines modifient le risque de plusieurs cancers fréquents chez la femme : ils accroissent le risque de cancer du col utérin, du sein et du foie, mais en même temps, ils offrent un effet protecteur contre les cancers de l’endomètre et de l’ovaire.

Hormonothérapie ménopausique maintenant “Cancérogène pour l’Homme”

Jusqu’à maintenant, l’hormonothérapie ménopausique combinée était considérée comme “peut-être cancérogène pour l’Homme”. Cette nouvelle évaluation a conclu, sur la base d’un plus large corpus de données, que cette thérapie est cancérogène, accroissant le risque de cancer du sein et, lorsque des progestatifs sont administrés moins de 10 jours par mois, celui du cancer de l’endomètre.

Evaluer les risques et les bénéfices des produits hormonaux et ne les utiliser que sous stricte supervision médicale

Cette nouvelle information sur les risques de cancer, et également la protection contre le cancer dans le cas des contraceptifs oraux, font qu’il est important que chaque femme qui utilise ces produits hormonaux discute des risques et des bénéfices avec son médecin, prenant en compte sa situation personnelle et son histoire familiale de cancer comme ses autres antécédents médicaux.

LES MONOGRAPHIES DU CIRC

Que sont les Monographies du CIRC?

Les Monographies du CIRC passent en revue et évaluent les données scientifiques publiées sur les dangers cancérogènes pour l’Homme. Il peut s’agir de produits chimiques, de mélanges complexes, d’expositions professionnelles, de facteurs de risque liés au mode de vie ou encore d’agents physiques et biologiques. Des groupes pluridisciplinaires internationaux formés d’experts scientifiques préparent les recensions critiques et les évaluations de consensus. Près de 400 agents et expositions potentiellement cancérogènes ont été identifies dans les 91 volumes que compte aujourd’hui la série de Monographies du CIRC, qui a procède à près de 900 évaluations depuis 1971. Des agences sanitaires nationales et internationales utilisent les Monographies du CIRC comme source de données scientifiques faisant autorité et fondent leurs efforts de prévention du cancer sur leurs conclusions.

Définitions

  • Groupe 1 – L’agent (le mélange) est cancérogène pour l’homme.
    Les circonstances d’exposition donnent lieu à des expositions qui sont cancérogènes pour l’homme.
    Cette catégorie n’est utilisée que lorsqu’on dispose d’indications suffisantes de cancérogénicité pour l’homme. Exceptionnellement, un agent (mélange) peut être placé dans cette catégorie lorsque les indications de cancérogénicité pour l’homme ne sont pas tout à fait suffisantes, mais qu’il existe des indications suffisantes de sa cancérogénicité chez l’animal de laboratoire et de fortes présomptions que l’agent (mélange) agit suivant un mécanisme de cancérogénicité reconnu.
  • Groupe 2
    Cette catégorie comprend les agents, mélanges et circonstances d’exposition pour lesquels, au maximum, on a obtenu des indications de cancérogénicité pour l’homme presque suffisantes et, au minimum, on ne dispose d’aucune donnée concernant l’homme mais on dispose d’indications suffisantes de cancérogénicité pour l’animal de laboratoire. Lesdits agents, mélanges et circonstances d’exposition sont classés soit dans le groupe 2A (probablement cancérogène pour l’homme), soit dans le groupe 2B (peut-être cancérogène pour l’homme) sur la base d’indications épidémiologiques et expérimentales de cancérogénicité et d’autres renseignements pertinents.
  • Groupe 2A – L’agent (le mélange) est probablement cancérogène pour l’homme.
    Les circonstances d’exposition donnent lieu à des expositions qui sont probablement cancérogènes pour l’homme.
    On fait appel à cette catégorie lorsque l’on dispose d’indications limitées de cancérogénicité chez l’homme et d’indications suffisantes de cancérogénicité chez l’animal de laboratoire. Dans certains cas, un agent (mélange) peut être classe dans cette catégorie lorsque l’on dispose d’indications insuffisantes de cancérogénicité pour l’homme et d’indications suffisantes de cancérogénicité pour l’animal de laboratoire et de fortes présomptions que la cancérogenèse s’effectue par un mécanisme qui fonctionne également chez l’homme. Exceptionnellement, un agent, un mélange ou une circonstance d’exposition peut être classé dans cette catégorie si l’on ne dispose que d’indications limitées de cancérogénicité pour l’homme.
  • Groupe 2B – L’agent (le mélange) est peut-être cancérogène pour l’homme.
    Les circonstances d’exposition donnent lieu a des expositions qui sont peut-être cancérogènes pour l’homme.
    Cette catégorie concerne les agents, mélanges et circonstances d’exposition pour lesquels on dispose d’indications limitées de cancérogénicité chez l’homme, et d’indications insuffisantes de cancérogénicité chez l’animal de laboratoire. On peut également y faire appel lorsque l’on dispose d’indications insuffisantes de cancérogénicité pour l’homme, mais que l’on dispose d’indications suffisantes de cancérogénicité pour l’animal de laboratoire. Dans certains cas, peuvent être classés dans ce groupe un agent, un mélange ou des circonstances d’exposition pour lesquels on a des indications insuffisantes d’une action cancérogène chez l’homme, mais pour lesquels on dispose d’indications limitées de cancérogénicité chez l’animal de laboratoire, corroborées par d’autres données pertinentes.
  • Groupe 3 – L’agent (le mélange, les circonstances d’exposition) ne peut pas être classé quant à sa cancérogénicité pour l’homme.
    Cette catégorie comprend essentiellement les agents, les mélanges et les circonstances d’exposition pour lesquels les indications de cancérogénicité sont insuffisantes chez l’homme et insuffisantes ou limitées chez l’animal de laboratoire.
    Exceptionnellement, les agents (mélanges) pour lesquels les indications de cancérogénicité sont insuffisantes chez l’homme mais suffisantes chez l’animal de laboratoire peuvent être classés dans cette catégorie lorsqu’il existe de fortes présomptions que le mécanisme de la cancérogénicité chez l’animal de laboratoire ne fonctionne pas chez l’homme.
    On classe aussi dans cette catégorie les agents, mélanges et circonstances d’exposition qui ne correspondent à aucune des autres catégories.
  • Groupe 4 – L’agent (le mélange) n’est probablement pas cancérogène pour l’homme.
    Relevent de cette catégorie les agents et mélanges pour lesquels on dispose d’indications suggérant une absence de cancérogénicité chez l’homme ainsi que chez l’animal de laboratoire. Dans certains cas, peuvent être classés dans ce groupe des agents ou des mélanges pour lesquels les indications de cancérogénicité pour l’homme sont insuffisantes, mais pour lesquels on dispose d’indications suggérant une absence de cancérogénicité chez l’animal de laboratoire, constamment et fortement corroborées par une large gamme d’autres données pertinentes.
  • Source : CIRC, 29 juillet 2005

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