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A l’occasion de la Semaine mondiale de sensibilisation à la résistance aux antimicrobiens (du 18 au 24 novembre), Santé publique France publie un état de lieux des prescriptions d’antibiotiques en ville en 2024. Dans un contexte de résistance croissante des bactéries aux antibiotiques, les résultats sont alarmants. « En 2024, une augmentation de 4,8 % des prescriptions, en ville et hors secteur d’hospitalisation, a été observée par rapport à 2023, avec plus de 860 prescriptions d’antibiotiques pour 1 000 habitants réalisées au cours de l’année », avance Santé publique France. Exprimée en Doses Définies Journalières (DDJ) – le nombre de doses d’antibiotiques consommées pour 1 000 habitants par jour – la consommation d’antibiotiques atteint 22,1 DDJ/1 000 habitants/jour, soit une augmentation de 5,4 % par rapport à 2023. Les niveaux atteints en 2024 sont ainsi comparables à ceux d’avant Covid-19.
La consommation d’antibiotiques avait en effet largement diminué en 2020, au début de pandémie. En 2021 – 2022, avec une reprise des infections hivernales courantes, les prescriptions d’antibiotiques étaient reparties à la hausse. 2023 avait été marquée par une faible diminution des prescriptions et consommations. Mais il s’agissait bien d’une exception au vu de la reprise de 2024.
Dans le détail, prescriptions et consommation d’antibiotiques se stabilisent chez les enfants de 0-4 ans. Toutefois, celles-ci ont particulièrement augmenté au troisième trimestre en même temps que les infections hivernales. « Ces dernières sont majoritairement virales et ne doivent pas justifier dans cette situation une prescription d’antibiotiques », souligne Santé publique France. L’autorité sanitaire met aussi en évidence une augmentation chez les 65 ans et plus. La Corse et la Provence-Alpes-Côte d’Azur enregistrent comme en 2023 les niveaux de consommation et de prescriptions les plus élevées, tandis que la Bretagne, l’Auvergne-Rhône-Alpes et les Pays de la Loire affichent les taux les plus bas.
Les prescriptions des médecins généralistes (75,6 % du volume total) ont augmenté de 6,2 %, celles des spécialistes (12,2 % du volume total) de 1,5 %. Les prescriptions des chirurgiens-dentistes (11,9 % du total) sont restées stables (0,2 %).
« Avec plus de 860 prescriptions d’antibiotiques pour 1 000 habitants par an, nous sommes encore loin de l’objectif cible de 650 prescriptions pour 1 000 habitants par an d’ici 2027, fixé par la Stratégie nationale de prévention des infections et de l’antibiorésistance. D’ailleurs, en 2024, la France occupe le 2ᵉ rang des pays consommant le plus d’antibiotiques en Europe », pointe le Dr Caroline Semaille, directrice générale de Santé publique France.
Alors que l’antibiorésistance gagne du terrain, notamment du fait de l’usage inadapté d’antibiotiques, Santé publique France appelle les prescripteurs à renforcer leurs efforts et à une meilleure sensibilisation des patients.
L’agence de santé publique rappelle quelques conseils pour limiter la consommation d’antibiotiques :
Les prescripteurs sont encouragés à suivre les recommandations de la HAS préconisant une réduction des durées d’antibiotiques, pour des infections courantes comme l’angine ou la cystite simple. Cela devrait permettre de limiter la quantité totale d’antibiotiques tout en maintenant leur efficacité.
En France, chaque année, quelque 130 000 patients présentent une infection à bactérie multirésistante ou hautement résistante. L’antibiorésistance causerait près de 5 500 décès annuels. Selon des projections récentes de l’OCDE, relayées par le ministère de la Santé, les infections résistantes aux traitements antibiotiques pourraient tuer quelque 2,4 millions de personnes en Europe, en Amérique du Nord et en Australie entre 2015 et 2050 si rien n’est fait. En France, d’ici 2050, on estime que 238 000 personnes mourront à cause de l’antibiorésistance.

Source : Santé publique France, ministère de la Santé

Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet