Maladies respiratoires chroniques : 6 patients sur 10 ont vu leur état s’aggraver en 2025

26 novembre 2025

La prévention tertiaire en France, c’est-à-dire celle qui vise à éviter les complications et la progression des maladies chroniques, joue-t-elle pleinement son rôle ? Selon les résultats de l’enquête 2025 de l’association Santé respiratoire France, la réponse est plutôt non. Du moins, pas suffisamment.

Dix millions de personnes sont concernées par une maladie respiratoire chronique, dont l’asthme, le cancer du poumon, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), la dilatation des bronches, le syndrome des apnées du sommeil etc. Mais que signifie réellement vivre avec une maladie chronique respiratoire ? Comment soutenir les malades et leurs aidants au quotidien ? L’enquête 2025 de Santé respiratoire France, présentée lors de ses 18es Rencontres au Sénat (14 novembre), dresse de nombreux constats, point de départ pour mieux faire.

La prévention tertiaire, kesako ?

Si la prévention primaire en matière de santé respiratoire est bien connue (c’est-à-dire les mesures visant à éviter l’apparition des maladies, comme la préservation de la qualité de l’air, les vaccinations, l’activité physique…), ainsi que la prévention secondaire, qui inclut le dépistage et la découverte précoce de la maladie pour éviter son aggravation, etc., la « prévention tertiaire », elle, reste une grande inconnue. En quelques mots, elle s’adresse aux personnes souffrant d’une maladie chronique et vise chez elles à limiter les complications et à préserver le bien-être global, à la fois physique et mental. Alors qu’elle est essentielle, l’enquête de Santé respiratoire France montre que la majorité des patients ignorent le terme de prévention tertiaire. Ils ont pourtant tout à gagner à appliquer ses principes au quotidien, à condition qu’on leur explique et qu’on leur en donne les moyens, et ceci « dès l’annonce du diagnostic, estime Christiane Pochulu, patiente experte. Expliquer ce parcours dès le diagnostic permet d’instaurer une dynamique d’action. C’est ce que nous avons appelé la Prev’Action ».

De manière générale, les patients décrivent un quotidien exigeant, qui demande une adaptation constante, un besoin d’accompagnement médical et paramédical renforcé. Or les résultats de l’étude pointent les limites de notre système de santé actuel. Ils mettent en évidence de fortes inégalités d’accès aux soins : près de six patients sur dix ont vu leur maladie s’aggraver au cours de l’année, plus d’un sur cinq a été hospitalisé. De plus, près de la moitié des personnes interrogées jugent les délais pour consulter un pneumologue trop longs.

Des patients motivés mais souvent livrés à eux-mêmes

Les dispositifs d’accompagnement des personnes malades chroniques respiratoires restent rares et trop peu utilisés : seuls 12 % des répondants ont suivi un programme d’éducation thérapeutique du patient (ETP), 14 % à peine une réadaptation respiratoire et 62 % des fumeurs n’ont jamais bénéficié d’aide au sevrage tabagique.

Pour précision, l’éducation thérapeutique du patient correspond à un dispositif structuré qui transmet des compétences pour comprendre la maladie respiratoire et gérer les soins au quotidien. Quant à la réadaptation respiratoire, elle vise à augmenter la capacité d’effort et réduire la dyspnée mais aussi des clés pour mieux vivre avec la maladie au quotidien en incluant de l’ETP.

A ce sujet, l’activité physique – et notamment l’activité physique adaptée (APA) – est le levier le plus intégré (cité par 70 % des interrogés), suivie de l’adhésion aux traitements (prendre correctement et régulièrement ses médicaments), de l’hygiène de vie, du sevrage tabagique et des gestes barrières (32 %).

Pour offrir les meilleures chances de vivre mieux avec la maladie et de stabiliser celle-ci, « Santé respiratoire France demande que les structures de réadaptation respiratoire et d’éducation thérapeutique soient accessibles sur tout le territoire et à tous les patients, indique le Dr Frédéric le Guillou, pneumologue et président de SRF, en augmentant leur capacité d’accueil, tout en déployant la réadaptation respiratoire à domicile et la télé-réadaptation. Ceci pour répondre au mieux aux besoins et choix des patients, aux demandes de prise en soins de qualité et de proximité, notamment dans les déserts médicaux et paramédicaux ».

1 patient sur 2 souffre d’anxiété ou d’isolement : la santé psychologique oubliée

Quant à la santé psychologique, au cœur de la vie des malades respiratoires, elle est souvent mise à mal, avec fatigue, anxiété, isolement et perte d’estime de soi. Beaucoup craignent la dégradation de leur état et vivent avec l’angoisse constante de l’essoufflement.

Dans les chiffres, la maladie respiratoire chronique altère profondément la qualité de vie : 61 % des patients qui ont répondu à l’enquête éprouvent une détresse psychologique, 53 % voient leur vie sociale perturbée, 66 % leur activité professionnelle, 71 % leur vie intime et 55 % leurs finances.

Cette souffrance, souvent invisible, nourrit un sentiment d’incompréhension et de culpabilité, en particulier chez les anciens fumeurs (la BPCO, l’une des principales maladies respiratoires chroniques, résulte pour 80 % du tabagisme). Le recours à un psychologue reste pourtant rare. Les groupes de parole jouent un rôle clé pour préserver le moral et maintenir le lien social.

Malgré ces obstacles, les patients tentent de développer leurs propres stratégies pour préserver leur équilibre. Le suivi du traitement, l’activité physique et le bien-être psychologique sont essentiels à leurs yeux. Un quart des patients (25 %) déclarent pratiquer la méditation, le yoga ou la cohérence cardiaque.

Pour Christiane Pochulu, « améliorer la compréhension du parcours de soins est essentiel pour de nombreux patients qui découvrent leur maladie sans connaître ses impacts ni les facteurs affectant leurs poumons. Par ailleurs, la prévention et la gestion des exacerbations (épisode d’aggravation de la maladie, comme une crise d’asthme ou de BPCO, ndlr) doivent être renforcées : de nombreux patients manquent d’informations pour les reconnaître, alors qu’une prévention tertiaire efficace réduit les hospitalisations évitables et leurs coûts. Enfin, un accompagnement durable, incluant un soutien motivationnel après le diagnostic, permet de maintenir sur le long terme les changements d’habitudes de vie. »

Pour information, la prévention tertiaire ne représente que 26 % des dépenses de prévention institutionnelles. 7,7 milliards d’euros sont aujourd’hui dépensés pour la santé respiratoire, dont seulement 150 millions pour la prévention.

Le replay du colloque « Prévention en santé respiratoire Passons à la prev’action ! » est disponible ici.

Pour en savoir plus : https://sante-respiratoire.com

  • Source : 18e Rencontres au Sénat, Santé respiratoire France (14 novembre 2025) ; La prévention tertiaire pour les malades respiratoires chroniques ; Analyse qualitative (Juillet 2025) et du 22/04 au 31/05/25, auprès de 841 patients. Prévention en santé respiratoire ; Passons à la prev'action! Quels sont les comportements et mesures à adopter pour les malades respiratoires ? Vendredi 14 novembre 2025 (Palais du Luxembourg)

  • Ecrit par : Hélène Joubert ; Édité par Emmanuel Ducreuzet

Destination Santé
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