Médicaments sur Internet : le gouvernement doit revoir sa copie

15 mai 2013

Seuls les pharmaciens titulaires d’une officine peuvent vendre des médicaments sur Internet. © Phovoir

« Doit mieux faire »… C’est en substance, le contenu de l’avis remis par l’Autorité de la Concurrence au gouvernement sur son projet de règlementation des ventes en ligne de médicaments non soumis à prescription.  Avis que l’Autorité a rendu public aujourd’hui « dans un souci de transparence », à la suite de différentes interprétations qui en ont été faites.

S’agissant de vente en ligne par des officines sur un marché ouvert au niveau européen, l’enjeu est de taille.  L’Autorité de la concurrence dénonce de façon réitérée, certaines dispositions particulièrement restrictives contenues dans le projet d’arrêté ministériel supposé réglementer ces opérations.

De manière réitérée en effet : dès le 13 décembre 2012 l’Autorité préconisait « que la vente en ligne ne soit pas limitée aux seuls médicaments que le pharmacien est autorisé à présenter en accès direct au public (médicaments dits de médication officinale) mais soit élargie à l’ensemble des médicaments non soumis à prescription médicale ».  Elle proposait toutefois que les autorités se gardent la possibilité d’interdire la vente en ligne de certains médicaments précisément désignés, pour des raisons objectives de santé publique.  Le gouvernement n’a tenu compte ni de l’une, ni de l’autre proposition.

Constatant que le projet d’arrêté « contient un ensemble important d’interdictions et de restrictions (…)  non justifiées par des considérations de santé publique », l’Autorité a rendu un nouvel avis le 10 avril 2013.  Elle fait bonne mesure en le diffusant aujourd’hui, ce qui permettra aux parties intéressées – politiques, professionnels, consommateurs… – de se forger une opinion hors des grands courants d’influence.

La menace européenne…

Concrètement, il est ici reproché au gouvernement de défavoriser les pharmaciens – mais in fine aussi les consommateurs –  par des restrictions abusives.  La réglementation européenne par exemple, autorise les pharmacies des pays de l’UE à vendre en ligne sur un même site internet  tous les médicaments non soumis à prescription.  Et non pas seulement donc, les produits en accès direct.  Les produits cosmétiques et d’hygiène – ou produits de parapharmacie – peuvent également être proposés sur ces mêmes sites.

Or le projet gouvernemental introduit deux entraves significatives à la vente en ligne pour les officines françaises : d’abord, il ne l’ouvre qu’aux produits en accès direct ; et ensuite,  il impose la création d’un site internet distinct pour les produits de parapharmacie.  Les pharmaciens français devront donc créer deux sites différents (double investissement) et les internautes faire leurs achats eux aussi, sur deux sites distincts.
Cette complication et bien d’autres mesures restrictives à caractère réglementaire, constitue selon l’Autorité un handicap réel qui risque de  placer les pharmaciens français « dans une position plus défavorable que leurs concurrents européens… »  Selon elle, « le développement de la vente en ligne doit permettre aux pharmaciens français de saisir de nouvelles opportunités, d’augmenter leur chiffre d’affaires et de faire émerger de nouveaux modes de commercialisation ».  Enfin et sans doute pour que les choses soient claires, l’Autorité de la concurrence rappelle au gouvernement qu’une « réglementation excessive de l’activité de vente en ligne de médicaments pourrait (…)  placer la France en situation de manquement à ses obligations au regard du droit de l’Union européenne. »

Ecrit par : Marc Gombeaud  – Edité par : Vincent Roche

  • Source : Autorité de la Concurrence, 15 mai 2013

Aller à la barre d’outils