Pays riches : enfance en danger ?
14 avril 2016
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Entre niveau de vie, bien-être, accès aux soins et à l’éducation, l’UNICEF relève les failles et les ressentis des enfants à travers les pays de l’Union européenne et de l’OCDE*. De profonds écarts s’affichent en fonction des pays et des ressources. Comment les enfants sont-ils impactés au quotidien par ces inégalités ? A quel point la France est-elle un mauvais élève en la matière ?
« Rares sont ceux qui nieraient que tous les enfants méritent un bon départ dans la vie (…). Dès l’enfance, la pauvreté, les problèmes de santé ou les difficultés scolaires peuvent profondément altérer les chances de réussite à l’âge adulte ». Voici les propos liminaires du rapport de l’UNICEF consacré aux inégalités entre les jeunes dans les pays riches. Les auteurs y dressent le bilan de l’inquiétante précarité infantile. Rendu public le 14 avril, ce travail s’appuie sur des données enregistrées entre 2002 et 2014. Et repose sur quatre critères :
- Les revenus. « Dans 19 pays du classement, plus de 10% des enfants vivent dans la pauvreté, dans des foyers disposant de moins de la moitié du revenu médian », peut-on lire dans le rapport. Cette situation dégénère au fil des années : « dans un tiers des pays l’écart s’est considérablement creusé entre 2008 et 2013 ». Une situation particulièrement préoccupante dans les pays exposés aux problématiques de migrations et de crises économiques : Chypre, l’Espagne, la Grèce, l’Italie et le Portugal ;
- L’éducation. La majorité des pays ont vu leur fossé d’inégalités se réduire sur la question de l’accès au savoir et au taux de scolarisation. Mais « très peu de pays sont parvenus à réduire à la fois l’écart de réussite et le nombre d’élèves en difficulté à la lecture ». Données édifiantes, « en Bulgarie, au Chili, au Mexique et en Roumanie, près d’un quart des élèves de 15 ans ne disposent pas des aptitudes et compétences nécessaires pour résoudre des exercices de base en lecture, en mathématiques et en sciences ». Auparavant considérés comme des modèles à suivre en matière d’équité et d’éducation, des pays comme la Finlande et la Suède « ont vu les inégalités augmenter et le niveau de réussite baisser » ;
- La santé. Concernant l’accès aux soins, les inégalités se creusent dans la majorité des pays. Les dégradations les plus significatives sont répertoriées en Irlande, à Malte, en Pologne et en Slovénie. Autre point, dans 10 pays, les disparités d’accès aux soins en fonction du sexe sont de plus en plus fréquentes avec une population féminine toujours plus marginalisée. Mais deux bonnes nouvelles donnent un peu de couleur à ce sombre tableau : le manque d’activité physique et les mauvaises habitudes en matière de nutrition sont en recul ;
- La satisfaction. Le rapport de l’UNICEF est le premier à prendre le pouls du degré d’épanouissement des enfants. Chacun des jeunes volontaires interrogés a en effet évalué son degré de bien-être sur une échelle de 1 à 10. Le score médian est de 8. Les enfants les plus heureux vivent majoritairement en Belgique, en Espagne et en République Tchèque. Les scores les plus faibles ont été rapportés par des enfants issus de l’immigration (en Allemagne, en Espagne, aux Etats-Unis, en Islande, en Irlande et en Italie).
Un peu de recul
Tous critères confondus, le pays où il fait bon vivre pour les enfants est le Danemark. En effet, l’inégalité la plus faible entre les enfants est enregistrée dans ce pays scandinave. L’Israël et la Turquie occupent en revanche les dernières places du classement. En fin de liste, la France est elle aussi une mauvaise élève. Sur les 35 pays de l’UE/OCDE, la France occupe la 28e place sur l’ensemble des critères d’égalité. La France est classé 35e en matière d’éducation, 23e concernant l’accès aux soins et 28e pour la satisfaction des enfants. « Ce décalage est tout à fait préoccupant », affirme Sébastien Lyon, directeur général de l’UNICEF France. Selon lui, le problème n’est pas uniquement d’ordre économique. Ces inégalités trouvent leur origine dans « un déploiement inégal des services et des ressources au détriment des enfants les plus vulnérables ».
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Des pistes pour améliorer le quotidien
Face à ces constats, l’UNICEF recommande dans son Bilan Innocenti 13 une protection des revenus (une distribution plus juste des prestations sociales) dans les foyers les plus pauvres avec enfants. Autre levier, intensifier les efforts en matière d’intégration scolaire. Enfin, la promotion d’un mode de vie plus sain (maintien des campagnes de santé publique) et une meilleure prise en compte du bien-être subjectif sont aussi à intégrer dans les politiques à venir.
* Créée en 1960, l’OCDE rassemble 34 pays Membres dans le monde, de l’Amérique du Nord et du Sud à l’Europe et l’Asie-Pacifique. La plupart sont des pays avancés, mais des pays émergents comme le Mexique, le Chili et la Turquie en font aussi partie.