Pénuries de médicaments : encore un hiver difficile
27 octobre 2023
Si des plans français et européen ont récemment été dévoilés pour lutter contre les ruptures de stocks de médicaments, les remontées du terrain, témoignant de difficultés déjà bien ancrées, laissent présager un hiver au moins aussi compliqué que le précédent.
Doit-on s’attendre à de nouvelles pénuries de médicament cet hiver ? Jeudi 26 octobre, Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) annonçait au micro de franceinfo que « près de 4 000 médicaments » étaient en rupture ou en risque de rupture en France. Parmi eux, l’amoxicilline, l’antibiotique le plus fréquemment prescrit pour les enfants et les adultes ou encore la cortisone, également souvent prescrite pour ses vertus anti-inflammatoires, notamment. Le président de l’USPO a en outre évoqué des pénuries d’anti-cancéreux, d’anti-hypertenseurs, d’antalgiques et d’antidiabétiques. « On a des ruptures ponctuelles, qui vont durer un mois, deux mois, certaines peut-être plus. Mais on a aussi des ruptures qui s’inscrivent dans la durée et là, ça devient dramatique », a-t-il ajouté.
Des contingentements en France ?
Début octobre, l’ANSM a annoncé son plan hivernal 2023-2024. Objectif : ne pas revivre les pénuries de l’hiver dernier. « En 2023, 37 % des Françaises et Français déclarent avoir été confrontés à des pénuries de médicaments », notait le Sénat dans un rapport publié en juillet. Pour anticiper les ruptures de stock, le plan prévoit de s’appuyer sur les données épidémiologiques de Santé publique France, les données de l’ANSM sur les approvisionnements et les remontées du terrain sur les difficultés rencontrées par les professionnels de santé et les patients. Parmi la batterie d’outils à disposition, l’ANSM cite les importations, les contingentements, ou encore les préparations magistrales, réalisées par un pharmacien pour un patient en particulier.
Consensus sur la nécessité de relocaliser
Mardi 24 octobre, c’était au tour de la Commission européenne d’annoncer son plan pour la sécurité de l’approvisionnement en médicaments de l’UE cet hiver. Parmi les mesures annoncées : un mécanisme européen de solidarité volontaire entre les Etats membres ou encore des flexibilités réglementaires sur le court terme. A moyen terme, la Commission veut diversifier les chaînes d’approvisionnement mondiales et « renforcer la capacité de l’Europe à produire » des médicaments.
Relocaliser la production, c’est aussi ce qu’a annoncé Emmanuel Macron en juin. 450 médicaments essentiels, sur lesquels concentrer les efforts, ont été listés. 25 d’entre eux étaient en cours de relocalisation au moment de l’allocution présidentielle. 25 autres devraient l’être rapidement. « Cela nous sortira vraisemblablement de la crise, mais que pour ces médicaments-là. Mais effectivement, la relocalisation et le fait qu’on ne soit pas dépendants d’autres nations pour la production de médicaments essentiels, c’est fondamental », soulignait pour franceinfo Pierre-Olivier Vario.
Moins d’un tiers de la consommation produite en France
Après la triple épidémie de l’hiver dernier – Covid-19, bronchiolite et grippe – qui a exacerbé les difficultés, le contexte épidémiologique pourrait être moins dur en 2023-2024. Demeurent des problèmes structurels dont la dépendance de la France à la production internationale de médicaments. « La part des médicaments produits sur le territoire français ne dépasse pas aujourd’hui un tiers de la consommation », notait le Sénat dans son rapport de juillet. Et d’ajouter : « La plupart des principes actifs sont produits hors d’Europe, surtout en Asie, entraînant une dépendance forte pour la production de médicaments matures ou génériques, essentiels à nos systèmes de santé ».
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Source : Commission européenne, 24 octobre 2023 – Ansm, plan hivernal 2023-2024, 5 octobre 2023 – Les Echos, 14 juin 2023 – Franceinfo, 26 octobre 2023 - Pénurie de médicaments, trouver le bon remède, Sénat , juillet 2023
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Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet