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Peut-on adopter un chat quand on est allergique… au chat ?
© Kulkova Daria / shutterstock.com
Le coupable de l’allergie au chat, qui peut déclencher rhinite, conjonctivite, eczéma, et parfois de l’asthme, est principalement (mais pas uniquement) la protéine Fel d 1 produite par le chat. Fel d 1 est synthétisée par plusieurs glandes de l’animal : salivaires surtout, cutanées, lacrymales et périanales. En se léchant, le chat répartit cette salive sur son pelage. La protéine est ensuite libérée dans l’environnement avec les poils et les squames. Elle y survit pendant plusieurs mois !
La question qui revient souvent, présente la Pre Sylvie Leroy, pneumo-allergologue au CHU de NICE et à l’IHU RespirERA est : « Puis-je adopter un chat alors que je vais avoir un enfant ? » De grandes études de cohorte menées en Europe, portant sur près de 20 000 enfants au total, n’ont montré ni effet protecteur ni effet délétère du fait d’avoir un chat à la maison durant la petite enfance – que ce soit sur le risque de développer de l’asthme ou une sensibilisation allergique aux allergènes du chat. « Dans ce contexte, ne pas avoir de chat à la maison n’est pas une recommandation que je formulerais aujourd’hui », affirme-t-elle.
Peut-on conseiller un type de chat plutôt qu’un autre ? Les données sont limitées. Une étude américaine de 2019 ayant comparé des groupes de chats a montré que « la concentration de Fel d 1 dans la salive varie selon le moment de la journée, mais surtout, elle varie énormément d’une bête à l’autre ! »
Et surtout, ni la couleur du pelage (noir, blanc, gris ou tricolore/calicot), ni l’aspect général du chat ne permettent de prévoir ce qu’il sécrète. Quant à une éventuelle différence liée au sexe, les chats mâles produisent plus de Fel d 1 que les femelles. Après la castration, leurs niveaux deviennent comparables à ceux des femelles.
Pour réduire le contact avec les allergènes de chat, les conseils habituels sont de limiter sa présence dans certaines pièces (la chambre), maintenir une bonne ventilation avec un renouvellement d’air élevé, nettoyer régulièrement les sols et meubles (en privilégiant l’aspirateur avec filtre HEPA), se débarrasser des tapis, et, si possible, laver fréquemment le chat. Mais où sont les preuves ?
En ce qui concerne l’intérêt d’un purificateur d’air, cette piste a été étudiée. L’efficacité de l’un de ces appareils équipés de filtres HEPA H13 a été évaluée dans une étude de haut niveau scientifique (randomisée en double aveugle), conduite par l’équipe du Pr Frédéric de Blay au CHU de Strasbourg dans une chambre d’exposition environnementale. Les chercheurs ont exposé des sujets allergiques aux allergènes de Fel d 1 avec ou sans purificateur. Les résultats montrent une réduction significative des symptômes bronchiques immédiats et retardés, avec moins de symptômes rhino-conjonctivaux en présence d’un purificateur avec filtre HEPA.
Une étude a montré que laver un chat toutes les semaines réduit considérablement la quantité de Fel d 1. Mais dès la semaine suivante, les quantités remontent au niveau initial ! En conclusion, « laver régulièrement le chat élimine une grande partie de Fel d 1 et peut diminuer la quantité d’allergène en suspension dans l’air, mais cet effet ne dure pas au-delà d’une semaine », conclut Sylvie Leroy.
Des croquettes ont été mises au point pour réduire la quantité de protéine allergénique active Fel d1. Le principe repose sur l’administration, par voie alimentaire, d’un anticorps IgY dirigé contre Fel d1, dérivé d’œufs de poule. Cet anticorps bloque Fel d1 de manière dose-dépendante : plus il en mange, plus la protéine allergisante est inhibée.
Une première étude expérimentale (12 semaines, 106 chats) a évalué l’effet de cette alimentation. Résultat : une diminution moyenne de 47 % de la concentration de Fel d1 actif dans les poils a été observée. Cette baisse était plus marquée chez les chats qui produisaient initialement de fortes quantités de Fel d1.
Une seconde étude, impliquant des chercheurs français a inclus 49 personnes allergiques aux chats. Leurs animaux ont été nourris avec les croquettes contenant l’anticorps IgY. Les participants ont évalué leurs symptômes via une application mobile (MASK-air®). Une amélioration des symptômes, notamment de la rhinite, a été rapportée.
C’est une preuve de concept intéressante. Néanmoins, il en faudra un peu plus pour convaincre les scientifiques : « ces résultats doivent être interprétés avec prudence, souligne la spécialiste. L’absence de groupe témoin, l’auto-évaluation via application mobile, et le taux de réponse partiel limitent la portée des conclusions. Une étude plus robuste chez l’homme, avec groupe contrôle et effectif plus important, sera nécessaire pour évaluer l’efficacité réelle de cette approche. »
Source : Suivi de la session du congrès francophone d’allergologie (avril 2025, Paris) « M8 - On ne doit jamais donner sa langue au chat ! » ; Does pet ownership in infancy lead to asthma or allergy at school age? Pooled analysis of individual participant data from 11 European birth cohorts. PLOS ONE. 2012:7(8):e43214 ; Influence of time and phenotype on salivary Fel d1 in domestic shorthair cats. J Feline Med Surg. 2019 Oct;21(10):867-874 ; Efficacy of air cleaners in asthmatics allergic to cat in AL YATECk) environmental exposure chamber. Clin Exp Allergy. 2020 Feb; 50(2): 160-169 ; Evaluation of different techniques for washing cats: quantitation of allergen removed from the cat and the effect on airborne Fel d 1. J Allergy Clin Immunol. 1997 Sep; 100(3):307-12 ; Duration of airborne Feld 1 reduction after cat washing. J Allergy Clin Immunol. 2006 Aug; 118(2):521-2 ; Reduction of active Fel d1 from cats using an antifel di egg IgY antibody. Immun Inflamm Dis. 2019 Jun; 7(2):68-73.
Ecrit par : Hélène Joubert ; Édité par Emmanuel Ducreuzet
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