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Le TFA, pour acide trifluroacétique, fait partie de la grande famille des PFAS, ces polluants éternels qui auraient des effets délétères sur notre santé. Il est utilisé dans de très nombreuses applications industrielles et pour la production de molécules fluorées. Il est retrouvé dans l’environnement – les rivières, les eaux souterraines, les sols, les plantes – du fait des rejets directs ou via la dégradation d’autres PFAS. Les preuves à leur encontre s’accumulent, étude après étude : cancers, hausse du taux de cholestérol, effets sur la fertilité, sur le développement du fœtus, sur le fonctionnement des reins, du foie…
Le TFA n’est toujours pas réglementé mais bel et bien soupçonné de nuire à notre santé. D’ailleurs, le flufénacet, pesticide dont la dégradation est notamment à l’origine du TFA, a été reconnu comme perturbateur endocrinien en 2024 par l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).
En 2021, une étude commandée par les fabricants de pesticides avait révélé de graves malformations chez les fœtus de lapin. Le TFA est depuis soupçonné de nuire à la santé reproductive humaine.
Ce mercredi 23 avril, une nouvelle étude pointe la contamination du vin par le TFA. Mené sur 49 vins dans dix pays de l’Union européenne par les membres du Réseau européen d’action contre les pesticides (PAN Europe), ce travail révèle que le TFA s’accumule dans les produits agricoles, et plus particulièrement dans le vin.
Selon les résultats, les vins de 2021 à 2024 présentent des concentrations moyennes de 122 microgrammes par litre (µg/L), avec des pics dépassant parfois 300 µg/L. Concernant les millésimes antérieurs à 1988, aucune trace de TFA n’a été observée. Puis, de 1988 à 2010, les concentrations de TFA ont grimpé jusqu’à 21 µg/L. « De 2010 à 2015, la contamination en TFA a fortement augmenté pour atteindre 40 µg/L, puis a continué d’augmenter de manière croissante par la suite, pour atteindre une moyenne de 122 µg/L (et une médiane à 110 µg/L). Ce dernier chiffre représente la moyenne arithmétique de 39 vins des millésimes 2021 à 2024 », note Générations Futures, membre de PAN Europe, dans un communiqué. Ces niveaux seraient 100 fois supérieurs aux concentrations déjà relevées dans les eaux de surface et l’eau potable.
Pour rappel, le TFA est le produit final non dégradable de l’herbicide flufénacet, interdit en mars 2025. Toutefois, un délai de 18 mois a été accordé pour écouler les stocks. Pour l’heure, cet herbicide est donc toujours utilisé. Et le TFA est aussi un métabolite de tous les pesticides PFAS, qui participent à la dissémination de ce polluant éternel dans les nappes phréatiques, notamment.
Pour Helmut Burtscher-Schaden, chimiste environnemental chez Global 2000, initiateur de l’étude, ces résultats sont alarmants pour deux raisons distinctes : « le premier est la forte concentration détectée, qui indique une bioaccumulation massive de TFA dans les plantes : nous ingérons probablement beaucoup plus de TFA par notre alimentation qu’on ne le pensait auparavant. Plus inquiétant encore, est la forte augmentation de la contamination depuis 2010. Il est urgent d’agir pour stopper toute nouvelle émission de TFA dans l’environnement ». Les auteurs de l’étude appellent ainsi à une interdiction immédiate des pesticides PFAS et des gaz fluorés, de même qu’un programme complet de surveillance du TFA dans les produits alimentaires.
Source : Message from the Bottle – The Rapid Rise of TFA Contamination Across the EU, avril 2023 – ANSES - Générations Futures
Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet