Pourquoi procrastinons-nous ?

03 novembre 2025

« On verra ça demain ». Ou « des toutes manières, je travaille mieux sous pression »… Pour certains, la procrastination est un véritable art de vivre. Ou l’art de tout remettre au lendemain. Quels ressorts psychologiques expliquent ce comportement ?

La procrastination consiste à reporter l’exécution d’une tâche ou d’une prise de décision, au lendemain par exemple. Tout en ayant bien souvent en tête les conséquences potentiellement négatives de ce report ; pour nous mais aussi pour notre entourage.

Une question de stress ?

Il y aurait ainsi une part d’irrationnel dans la procrastination. Même si la littérature scientifique apparaît lacunaire sur ce sujet, quelques auteurs sont parvenus à identifier des raisons psychologiques sous-jacentes. Telles que le stress, comme le met en évidence le psychologue britannique Fuschia Sirois (Durham University), selon laquelle, « du point de vue de la régulation de l’humeur, les contextes stressants augmentent nécessairement le risque de procrastination ». En effet, à ses yeux, « ils épuisent les ressources d’adaptation et abaissent le seuil de tolérance aux émotions négatives ». Résultat, dans de tels contextes, le risque de procrastination augmente car celle-ci constitue « un moyen peu coûteux en ressources d’éviter de nouvelles émotions négatives et difficiles ».

Autoprotection

Du côté de l’université de Princetown (Angleterre), l’on s’intéresse particulièrement à la procrastination estudiantine… « Elle est souvent une stratégie d’autoprotection pour les jeunes en question », rapportent ses représentants. « Par exemple, procrastiner permet de toujours avoir l’excuse du ‘manque de temps’ en cas d’échec, ce qui préserve la confiance en ses propres capacités ». Un constat qui renvoie à la notion de stress à travers également l’idée en quelque sorte « d’éviter de travailler pour…  éviter d’être jugés sur nos compétences ».

Qui sont les procrastinateurs ?

En 2022, une équipe de l’Inserm s’était glissée dans le cerveau des procrastinateurs lors d’une étude menée auprès de 51 participants. Ils ont passé plusieurs tests lors durant lesquels leur activité cérébrale était mesurée par IRM. Ils devaient attribuer une note subjective à des récompenses, à des efforts à fournir. Préféraient-ils faire une petite récompense immédiate ou une plus grosse récompense plus tard ? Réaliser un petit effort tout de suite ou un plus gros effort plus tard ? « Les données d’imagerie ont révélé l’activation au moment de la prise de décision d’une région cérébrale appelée cortex cingulaire antérieur. Cette région a pour rôle d’effectuer un calcul coût-bénéfice en intégrant les coûts (efforts) et les bénéfices (récompenses) associés à chaque option », note l’Inserm.

Concernant la procrastination précisément les participants ont subi deux tests.  Dans le premier, ils devaient décider soit de produire un effort le jour même pour être récompensés, soit de produire un effort le lendemain et de patienter jusque-là pour obtenir la récompense. Dans le second, de retour chez eux, ils devaient remplir plusieurs formulaires assez fastidieux et les renvoyer sous un mois maximum pour être indemnisés de leur participation à l’étude. L’ensemble des résultats a permis aux scientifiques de mettre au point un modèle mathématique de prise de décision.

« La procrastination pourrait être spécifiquement liée à l’impact du délai sur l’évaluation des tâches exigeant un effort. Plus précisément, elle peut s’expliquer par la tendance de notre cerveau à décompter plus vite les coûts que les récompenses », explique Mathias Pessiglione, chercheur à l’Inserm. Via les résultats au test, l’imagerie cérébrale, les chercheurs ont pu, grâce à leur modèle, établir le profil de procrastinateur pour chaque participant. Celui-ci prenait en compte leur attirance pour les récompenses, leur aversion à l’effort, et leur tendance à dévaluer les bénéfices et les coûts avec le délai. Le modèle s’est révélé capable de prédire le délai pour chaque participant à renvoyer le formulaire rempli !

  • Source : Sirois FM. Procrastination and Stress: A Conceptual Review of Why Context Matters. Int J Environ Res Public Health. 2023 Mar 13;20(6):5031. - Svartdal F, Granmo S, Færevaag FS. On the Behavioral Side of Procrastination: Exploring Behavioral Delay in Real-Life Settings. Front Psychol. 2018 May 16;9:746. - Princetown University, Inserm. Sites consultés le 30 octobre 2025

  • Ecrit par : David Picot – Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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