Prévention contre l’alcool : les addictologues corrigent Vin & Société
29 juin 2018
Dzmitry Ryshchuk /shutterstock.com
Le 27 juin, un plan de prévention contre la consommation d’alcool a été remis au Président de la République par Vin & Société, soient 558 000 acteurs de la filière vitivinicole. L’Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (ANPAA) y voit « un coup de force, une provocation ». Et publie sa version « revue et corrigée ».
Ce 27 juin, Vin & Société a remis au gouvernement « sa contribution au Plan National de Santé Publique Priorité prévention ». Les 7 mesures inscrites sont les suivantes :
– « Faire mieux respecter l’interdiction de vente d’alcool aux mineurs » ;
– « Informer sur les risques liés à la conduite sous l’influence de l’alcool » ;
– « Intensifier la lutte contre le binge drinking » ;
– « Contribuer à la diffusion du message « zéro alcool » pendant la grossesse » ;
– « Promouvoir les comportements responsables auprès des consommateurs » ;
– « Améliorer la connaissance et la mise en œuvre de la consommation responsable auprès des futurs professionnels (de la filière vitivinicole ndlr) » ;
– « Améliorer l’autorégulation en matière de publicité et favoriser les bonnes pratiques » ;
Les corrections de l’ANPAA en termes de santé publique
Selon l’Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (ANPAA), « il n’y a eu aucune concertation, ni information formelle avec les acteurs de santé ». Autre point, « les objectifs affichés ne sont suivis d’aucun engagement précis, d’aucune contrainte ni interdiction qui permettrait des effets concrets ».
Opposé à ce « conflit d’intérêt », l’ANPAA publie une révision de cette contribution de Vin & Société (à consulter en intégralité en bas de page). L’association y dresse un état des lieux précis de l’épidémiologie, énumère les mesures à mettre en place afin notamment pour la vente à emporter et les débits de boissons temporaires. Elle avance la nécessité d’interdire d’acheter de l’alcool aux caisses automatiques, de vendre de l’alcool à domicile et de faire la publicité de ces boissons sur internet. Autant de revendications absentes du le document fourni par Vin & Société.
Pour l’ANPAA, « ce “plan santé” des alcooliers est un camouflet à Santé Publique France et à l’Institut national du Cancer (INCa), dont les recommandations de leurs experts, publiées en mai 2017, sont balayées. Il est vrai qu’elles avaient le grand tort d’offrir un cadre précis et des propositions concrètes ».
Un lourd passif ?
Autre point, « l’ambiguïté » est bien réelle : la conseillère d’Emmanuel Macron à ce sujet*, Audrey Bourolleau, n’est autre qu’une ancienne déléguée générale de cette filière viticole. Pour rappel, le 2 février, l’association s’offusquait déjà de cette nomination. « De par leurs intérêts, ils ne peuvent avoir à cœur de dire toute la vérité sur les risques liés à la consommation d’alcool ».
L’ANPAA réclame à ce jour un retour aux « sages recommandations de l’OMS. Les politiques de santé publique concernant l’alcool doivent être élaborées par des représentants de la santé publique, sans ingérence d’intérêts commerciaux ».
A noter : cette prévention constitue un enjeu de santé publique majeur quand on sait que les déboires de l’alcool coûte la vie à plus de 49 000 Français chaque année.
*«agriculture, pêche, forêt et développement rural »
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Source : Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (ANPAA), le 29 juin 2018
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Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Dominique Salomon