Prisons : les soins manquent à l’appel
22 juillet 2016
Sakhorn/shutterstock.com
Publié ce 19 juillet, un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) pointe du doigt le manque de prise en charge sanitaire en milieu carcéral. Maladies psychiatriques ou transmissibles, addiction à l’alcool et usage de drogues dures… beaucoup de pathologies sont concernées. Mais les études sur le sujet restent rares. Pour dénoncer ces conditions de vie déplorables, les experts de l’IGAS n’ont eu d’autres choix que d’utiliser des données datées de… plus de 10 ans.
Selon le rapport de l’IGAS, les 188 prisons françaises accueillaient en 2015 un total de 66 270 détenus. Une partie d’entre eux restent éloignés des soins. Pourtant la population carcérale nécessite une prise en charge particulière.
Une fragilité psychiatrique… et physique
« Une personne sur 10 est orientée vers une consultation de psychiatrie à l’issue de l’examen clinique d’entrée en détention », révèle le rapport de l’IGAS. Plus de la moitié des entrants a déjà souffert d’une pathologie psychiatrique. Un sur vingt-cinq « répond aux critères de schizophrénie » et des troubles dépressifs sont repérés auprès d’un tiers de la population détenue. Donnée édifiante, un prisonnier présente 7 fois plus de risque de suicide comparé à la moyenne nationale.
L’addiction s’invite aussi entre les barreaux. Ainsi 80% des détenus fument des cigarettes dans leur cellule. A leur entrée en prison, « 31% déclarent une consommation excessive d’alcool ». Enfin, des « traitements de substitution aux opiacés » sont prescrits à 10% des détenus, preuve que la consommation de drogues dures n’est pas un phénomène marginal.
Autre point, le risque d’infections transmissibles se maintient à un niveau élevé : 1 personne incarcérée sur 100 est séropositive et 1 sur 20 est diagnostiquée pour une hépatite virale. Des proportions 4 fois supérieures à la population générale.
Malgré ces lourds fléaux, le nombre de travaux consacrés à la santé carcérale reste limité. Comme le précise l’IGAS, ces « études sur l’état de santé des détenus datent de 2003, de 2004 pour la prévalence des troubles psychiatriques, de 2001 pour les handicaps et dépendances ». Actualisées en 2010, les seules données relativement récentes concernent l’incidence du VIH, du VHC et des prescriptions de traitement de substitution.
Se faire soigner entre les murs d’une prison ?
Pour améliorer le suivi des détenus, l’IGAS insiste donc sur la nécessité de :
- Maintenir l’activité de l’Observatoire des structures de santé des détenus (OSSD). Créée en 2010, cette entité apparaît comme l’organe le plus efficient pour relever les données de terrain. « Certes déclaratif, ce recueil s’avère précieux pour corriger les inégalités et les manques d’accès aux soins. » ;
- Mettre en place une nouvelle stratégie politique basée sur l’épidémiologie et les soins adaptés au milieu carcéral relève de la priorité. Il existait bien un Plan d’action stratégique 2010-2014 mis en place pour améliorer la situation. Mais selon l’IGAS, ce texte – davantage centré sur des actions administratives que sur des objectifs sanitaires – ne prend pas le problème à bras le corps ;
- Augmenter la disponibilité des médecins en cellules. Entre 1997 à 2013, la population carcérale a fait un bond de 25%. Mais dans le même temps, les effectifs médicaux n’ont pas suivi une progression similaire. En complément du personnel, le recours facilité à la Sécurité sociale et la mise en place d’aménagements de peine pour raisons médicales viendraient également favoriser l’accès aux soins.
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Source : Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS), le 19 juillet 2016
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Ecrit par : Laura Bourgault – Edité par : Vincent Roche