Quand les médias influencent les choix de santé ou… tuent !

11 mars 2003

« Coronation Street » est l’une des plus anciennes séries télé outre-Manche. Alors quand le public apprit qu’Alma, l’un de ses personnages principaux, était décédée d’un cancer du col, la tristesse a été sans bornes. Au point de se suicider ?

Dans le cas d’espèce, il n’y pas encore eu de suicide. Cependant, plus de 14 000 demandes de dépistage du cancer du col ont été effectuées juste après l’annonce du cancer d’Alma. Une raison de se réjouir ? Pas vraiment, car la plupart des demandes proviennent de femmes qui ont simplement devancé l’appel et devaient de toute façon subir l’examen. Ensuite et surtout, les laboratoires sont débordés et tardent à donner des résultats, augmentant inutilement l’anxiété des femmes et peut-être leurs tendances suicidaires…

Selon une lettre de spécialistes britanniques de la santé publique, publiée dans le British Medical Journal (BMJ), « les producteurs de télévision devraient réfléchir au pouvoir de telles histoires. Si elles font de l’audience, elles peuvent aussi entraîner peur, anxiété, et provoquer une charge indue sur les structures de soins ».

Toujours dans le BMJ, deux autres auteurs ont constaté l’impact de la maladie et de la mort d’Alma sur la fréquentation de la ligne téléphonique d’aide et d’information CancerBACUP. Les appels venaient principalement de quinquagénaires et de sexagénaires, ce qui coïncide avec les 63 ans de l’actrice. « Mais qu’en est-il », demandent les auteurs, « de celles qui n’ont pas téléphoné et sont restées avec une angoisse probablement non fondée ? » Mystère…

L’influence des médias sévit plus dramatiquement en Chine, comme en témoigne une autre lettre de médecins de Hong-Kong également publiée dans le BMJ. Ils ont constaté une hausse alarmante des suicides par combustion, dans une pièce hermétiquement close, de charbon de bois pour barbecue ! Cette façon de mourir avait été présentée par les médias comme étant plus facile et plus confortable que la défenestration ! Le suicide au charbon fut même présenté comme une élégante façon d’échapper aux problèmes financiers. Ben voyons…

  • Source : British Medical Journal, 28 février 2003 – Vol 326, n°7387

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